High

Erika Fatland, High: A Journey Across the Himalaya, Through Pakistan, India, Bhutan, Nepal and China: j’avais déjà lu un autre récit de voyage de la norvégienne Erika Fatland, un récit où elle visitait tous les pays bordant la Russie. Ici, elle part du même principe: elle a voyagé dans tous les pays de la chaîne de l’Himalaya, du Pakistan à la Chine, en passant par l’Inde, le Bhoutan et le Népal. Elle visite mais surtout, elle rencontre des gens et parle avec eux, dévoilant des histoires intimes ou plus larges, liées à l’histoire du pays ou des montagnes. Elle s’intéresse aux femmes, à leur vie, aux tabous qui existent encore dans certaines sociétés reculées. Certaines parties sont plus développées, au Népal en particulier, où elle raconte qu’elle a eu d’excellents guides. En Chine par contre, le contact est difficile; tout est contrôlé et ses guides ont du mal à sortir du programme prévu (ça ne donne vraiment plus envie d’y aller). Ce sont les parties les moins intéressantes du livre, mais elles permettent aussi d’ouvrir les yeux sur à quel point le gouvernement chinois a le contrôle sur tout.

Comme le sujet est l’Himalaya, il y a évidemment un trek jusqu’au camp de base de l’Everest, trek pendant lequel Fatland souffre du mal des montagnes, et perd même conscience à un moment. Elle marche aussi dans les vallées, et sur des chemins moins connus, assistant à des fêtes locales comme au Bhoutan. Son récit est vraiment intéressant et détaillé (quasi 600 pages quand même – c’est mon premier pavé de l’été avant l’été), et je sais que je lirai ses autres récits avec plaisir. Dommage qu’aucun éditeur français ne se décide à les traduire (contrairement au reste de l’Europe).

Erika Fatland, High: A Journey Across the Himalaya, Through Pakistan, India, Bhutan, Nepal and China, MacLehose Press, 2022, 570p. (traduit du norvégien par Kari Dickson, pas de traduction française)

The Border

Erika Fatland, The Border: A Journey Around Russia Through North Korea, China, Mongolia, Kazakhstan, Azerbaijan, Georgia, Ukraine, Belarus, Lithuania, Poland, Latvia, Estonia, Finland, Norway, and the Northeast Passage: Erika Fatland, voyageuse et autrice norvégienne, est passionnée par la Russie et a décidé de réaliser un périple qui suit les frontières de l’immense pays. Elle commence par la conclusion de son voyage, une croisière dans la mer Arctique, empruntant le passage du nord-est. Elle raconte des anecdotes, décrivant ce qu’elle voit, mais elle explique également toute l’histoire de la région. Elle fait de même pour son voyage via la terre – la première partie en Corée du Nord est particulièrement savoureuse (et un peu angoissante en même temps). Elle relate le passé, le mouvement des frontières suite aux guerres et s’intéresse aux habitants de ces zones, les interrogeant sur leur vie quotidienne et l’influence de géant russe. Elle rencontre des gens très divers, certains sont nostalgiques de l’URSS, d’autres revendiquent leur liberté, leur indépendance. Cet aspect devient particulièrement important une fois qu’elle aborde la région du Caucase et cela m’a bien éclairé à propos de la situation actuelle. Elle termine son long périple sur la rivière qui marque la limite entre la Russie et la Norvège, à l’extrême nord de l’Europe.

Le livre est long, mais il est passionnant de bout en bout (j’ai juste flanché un peu lors des descriptions des conquêtes de Genghis Khan, que j’ai déjà lues un peu trop souvent), j’ai appris de nombreuses choses et j’ai aimé lire le côté personnel, la partie qui est vraiment récit de voyage (je me suis retrouvée dans ses angoisses avec les chauffeurs de taxi un peu bizarres). J’ai lu la version traduite en anglais (du norvégien) et je trouve extrêmement dommage qu’il n’y ait pas de version française (il existe des traductions dans quasi toutes les langues européennes, y compris le néerlandais – c’est comme ça que j’ai découvert le livre).

Erika Fatland, The Border: A Journey Around Russia Through North Korea, China, Mongolia, Kazakhstan, Azerbaijan, Georgia, Ukraine, Belarus, Lithuania, Poland, Latvia, Estonia, Finland, Norway, and the Northeast Passage, MacLehose Press, 2020, 608p.

Un livre d’une autrice norvégienne, qui cadre tout à fait dans le challenge de Céline du blog Mon journal livresque.

Sur la route du Danube

Emmanuel Ruben, Sur la route du Danube: au début de l’été 2016, Emmanuel Ruben est parti à vélo d’Odessa avec son ami Vlad pour remonter le cours du Danube jusqu’à ses sources. Il raconte ses aventures dans la chaleur de l’été, ses rencontres avec les locaux mais aussi l’histoire de chaque endroit qu’ils traversent. Il parle des Romains – le fleuve a longtemps été la frontière de l’empire, des Ottomans sans cesse repoussés lors de nombreuses batailles, du rideau de fer imposé par le bloc de l’Est, des réfugiés de Syrie et d’Afghanistan. Tout cela est passionnant.

Mais j’ai détesté le personnage que j’ai d’abord pensé être bien plus âgé, un peu comme ces hommes imbus de leur personne qui ont leur mot à dire sur tout et qui parlent très fort (il avait 36 ans au début du voyage). Il critique beaucoup, et tout particulièrement la modernité. Il déteste l’Union Européenne (même s’il apprécie les passages faciles des frontières) et ne cesse de transmettre ses opinions sur tout et n’importe quoi, du glyphosate aux touristes vieux et bedonnants qui font des croisières (une fois ça passe, mais pas des dizaines de fois – et qu’est-ce qu’il y a de mal à ça ?), en passant par le capitalisme, sa bête noire. Au final, il n’aime que les jolies femmes (c’est lassant aussi) et la culture slave (qui est tellement plus belle que la sienne, la française). C’est aussi un peu étonnant quand même de voir un cycliste qui entreprend un aussi long voyage et qui n’est pas vraiment préparé (il n’a aucune pièce de rechange pour son vélo). Et puis il y a cette partie centrale, un peu incompréhensible, qui parle d’un accident qu’il a eu. Il joue beaucoup sur l’écriture, qui coule à flots, parfois sans paragraphes et sans ponctuation (puis il se vante de l’avoir fait). Le livre est long, c’est un pavé, et ces répétitions d’opinion m’ont fatiguée.

Une idée piochée chez Keisha qui est bien plus positive que moi, et un livre qui participe au challenge du Pavé de l’été de Brize.

Emmanuel Ruben, Sur la route du Danube, Rivages, 2019, 608p.

La panthère des neiges

Sylvain Tesson, La panthère des neiges: je m’étais promis de ne plus rien lire de Sylvain Tesson mais voilà, on m’a proposé d’aller voir le documentaire de Marie Amiguet et Vincent Munier et je voulais être préparée. De plus, le livre n’est pas très long (moins de 200 pages) et je l’ai lu en une après-midi. Tesson est invité par le photographe animalier Vincent Munier pour aller observer la panthère des neiges dans les hauts-plateaux du Tibet, aux sources du Mékong. Ils sont accompagnés par Marie Amiguet qui filme et Léo-Pol Jacquot qui s’occupe de la prise de son (même si en fait tous les rôles sont partagés). Tesson raconte son expérience sur son ton habituel. Il n’a aucune patience, il veut parler tout le temps (alors qu’il est censé se taire pour ne faire fuir les animaux), et surtout, il râle beaucoup sur la société actuelle. Il est fatigant avec ses commentaires qui parsèment le livre. Et il en profite aussi pour rabaisser un de ses prédécesseurs, Peter Matthiessen, qui avait pourtant écrit un très beau livre sur le sujet (je l’ai lu bien avant l’existence de ce blog et il m’avait laissé une forte impression). Il la voit, la panthère, mais ce n’est pas suffisant, donc il remplit des pages et des pages avec des expériences du passé et des réflexions sur la religion (il les aime toutes, sauf l’Islam). Je ne me laisserai plus avoir: Tesson est banni de ma vie future, je n’ai plus aucune envie de lire ses élucubrations. Par contre, je vous invite à aller voir le film qui est superbe, et dans lequel Tesson ne prend pas trop de place – ce sont les animaux les grandes stars.

Mississippi solo

Eddy L. Harris, Mississippi solo: milieu des années 1980 – âgé de 30 ans, Eddy L. Harris n’a pas encore connu le succès en tant qu’écrivain. Il décide de se lancer dans un projet un peu fou: descendre le Mississippi en canoë depuis ses sources au lac Itasca jusqu’à la Nouvelle-Orléans. Il n’est pas sportif, n’a aucune expérience en canotage et n’est même pas habitué au camping, mais il part avec entrain et apprend sur le tas. Le fleuve n’est pas facile à naviguer – au début il n’est pas assez profond, par la suite, il est envahi par d’immenses barges qu’il faut éviter. Il traverse les états du nord au sud et est souvent invité par les locaux à discuter ou à manger. Cela ne lui semblait pas évident au départ: il se demandait comment le fait d’être noir allait être reçu. Allait-il être confronté au racisme ? La question le taraude pendant tout le voyage. Il a quelques mésaventures, il pense aussi à abandonner à mi-chemin, mais finalement il atteint son but.

Le récit est intéressant, très introspectif, et au final assez peu touristique ou historique comme ont pu l’écrire d’autres auteurs. Et c’est là que j’ai un peu décroché, je n’ai pas toujours été passionnée par le fil d’idées de l’auteur. Ce qu’il fait, c’est une grande aventure, mais sa manière de la transmettre est très terre à terre, ce qui n’est pas un mal en soi, mais pour moi, le récit manque de quelque chose. Le livre est sorti à l’origine en 1988 et a eu un énorme succès aux Etats-Unis – la traduction en français s’est fait attendre jusqu’en 2020, et dans cette édition, Harris revient sur son voyage dans la postface, expliquant qu’il l’a réalisé à nouveau, mais sans entrer dans les détails.

A trip of one’s own

Kate Wills, A trip of one’s own. Hope, heartbreak and why travelling solo could change your life: le sous-titre explique assez clairement pourquoi j’ai été attirée par ce livre – c’est le récit d’une femme qui voyage en solo et qui aime ça ! Kate Wills est journaliste, spécialisée en voyages et tourisme. Elle parcourt donc le monde pour écrire divers articles (un métier qui me plairait bien, d’ailleurs !). Suite à son divorce, elle commence à voyager seule et c’est cette expérience qu’elle raconte dans ce livre, mettant en avant tous les avantages de ce type de périples. Je n’ai pas grand-chose à dire sur ce récit, il n’est pas ennuyeux (je l’ai même dévoré) mais il reste assez convenu; il donne des conseils (que je connaissais déjà pour la plupart) et le point de vue d’une femme. Mais il n’est pas pour moi: comme tous les autres récits du même genre, il insiste sur le fait qu’on rencontre toujours des gens en voyage et qu’on se crée de nouvelles amitiés, et que c’est vraiment bien. Je reste totalement imperméable à ce genre de choses, à tel point que ça commence même à m’énerver un peu (et je ne parle même pas de la fin !). J’aime beaucoup mes voyages solitaires, avec parfois des rencontres fortuites, mais qui ne durent jamais très longtemps. Je devrais sans doute arrêter de lire ce type de livres (mais je sais que je ne le ferai pas – j’espère toujours trouver celui qui me correspondra tout à fait) ! Par contre, il peut sans doute aider celles qui n’ont pas encore franchi le pas du voyage en solo.

The traveling feast

Rick Bass, The traveling feast. On the road and at the table with my heroes: préambule – juste après avoir commencé ce livre, j’ai regretté d’avoir choisi de la non-fiction, je voulais plutôt lire un roman, de préférence passionnant après avoir traîné des semaines sur The Bass Rock. Mais j’ai continué ma lecture. Rick Bass, écrivain américain dont j’avais lu Nashville Chrome, a du mal à se remettre de son divorce et se pose des questions sur sa vie actuelle. Il décide de partir sur les routes, abandonnant un moment sa maison isolée dans la nature sauvage du Montana. Il souhaite en effet rencontrer des écrivains qui l’ont aidé ou influencé dans sa carrière et transmettre ces conseils à une génération plus jeune, certains de ses étudiants mais aussi une de ses filles. Il propose donc à une série d’auteurs de venir chez eux et de préparer un repas, puis de discuter littérature. Tout ceci pourrait être un peu ennuyeux à lire, mais c’est sans compter le talent de Rick Bass, et ses nombreuses aventures. Parce que tout ne se passe pas comme prévu ! Il fait passer de la viande en contrebande à l’aéroport d’Heathrow mais au cours du voyage, elle s’est dégelée et du sang coule du paquet, il fait exploser un barbecue au gaz, il se perd – souvent… Et s’il est au centre du récit, il y a aussi ces rencontres avec de grands écrivains américains, de Jim Harrison à Denis Johnson, de l’éditeur de Raymond Carver à Joyce Carol Oates. Au final, après une vingtaine de pages, j’étais totalement accro à ce récit et je l’ai dévoré en quelques jours !

Les villages du Japon

Jordy Meow, Les villages du Japon: à vrai dire, je ne suis Jordy Meow que depuis peu de temps mais j’aime beaucoup les photos qu’il poste sur Instagram. C’est par cette voie-là que j’ai appris qu’il éditait un livre consacré aux villages du Japon. Il a voyagé partout dans le pays dans des lieux qui sont le plus souvent hors des circuits touristiques mais qui sont toujours intéressants, et qui donnent envie de suivre ses pas. Trente-trois villages sont présentés, j’en ai visité un (Kitsuki), cela me laisse donc de la marge pour les prochains voyages ! Les photos sont superbes, les textes informatifs et souvent personnels, mais j’avoue que j’aurais aimé lire bien plus sur le sujet. Si vous êtes intéressés par le Japon, je vous recommande néanmoins chaudement ce livre, disponible sur son site Japon Secret.

King Cobra

Harry Hervey, King Cobra – Mekong adventures in French Indochina: 1925 – l’auteur et scénariste américain Harry Hervey débarque à Saïgon. Son souhait est de visiter un site oublié, le temple de Vat Phou, au Laos. Il raconte ses rencontres dans la métropole vietnamienne, puis son voyage vers Phnom Penh et Angkor. Ses descriptions donnent un caractère mystérieux au temples, et à l’Indochine en général. Puis il continue son voyage, remontant le Mékong, découvrant la vie locale et rencontrant divers représentants de la colonie, souvent postés dans des lieux fort isolés.

J’avais déjà lu Congaï. Mistress of Indochine du même auteur, un roman inspiré par ce voyage, et j’avais beaucoup apprécié cette plongée dans le monde colonial et dans un certain exotisme, tel qu’il est vu par un occidental. L’auteur a l’art de décrire la luxuriance de la jungle, la chaleur tropicale qui rend indolent, les trésors cachés et oubliés de tous… A certains moments, il porte un regard critique sur la société coloniale mais il est surtout en quête d’exotisme et d’histoires à raconter. Le livre est richement illustré par des photos et cartes postales de l’époque, et est complété par une biographie de l’auteur, une nouvelle et divers textes concernant le livre.

Saisons du voyage

Cédric Gras, Saisons du voyage: avec ce récit, Cédric Gras propose une réflexion sur le voyage. Il raconte certaines de ses aventures, notamment un de ses premiers périples où il a été de la Mongolie jusqu’au Tibet. Il parle de son dénuement qu’il a l’air de trouver nécessaire (alors que pour moi, il s’agirait plutôt d’un manque de préparation et d’une grande naïveté) et souligne l’importance des rencontres avec les populations locales. Il n’est pas tendre avec les autres voyageurs, avec les touristes, et parfois j’ai eu l’impression qu’il considère sa manière de voyager comme la seule acceptable. Heureusement d’autres passages sont beaucoup moins revendicateurs et même très agréables à lire, mais j’avoue qu’un mois après avoir terminé le livre, il ne m’en reste pas beaucoup.