6 years

Je viens d’avoir 5 ans et mes vacances sont comme toujours partagées entre la maison et la mer, à Middelkerke. A la plage, je monte mon stand de fleurs en papier et parfois je vais en acheter avec des coquillages chez d’autres filles, mais souvent je considère que les miennes sont bien plus jolies ! Mes parents proposent aussi quelques excursions et nous allons avec ma cousine à Meli. Je dois bien avouer que je ne me sens pas du tout à l’aise à proximité des chèvres alors que Caroline les caresse sans problème. Heureusement, je suis bien protégée sur les épaules de papa (un de mes endroits favoris !).

Ma maman m’habille toujours chez Dujardin mais les tenues de plage sont constituées de mini shorts en tissu éponge avec sweat-shirts assortis et sandales Teko.

En septembre, je rentre en troisième maternelle, dans la classe de Madame Julienne, toujours dans la même école à côté du Delhaize. Mimi, ma gardienne continue à me garder après 4 heures en attendant que mon papa vienne me chercher chez elle. Madame Julienne nous occupe bien avec des dessins et elle nous apprend déjà à écrire nos noms en majuscules pour les signer.

Pour la Saint-Nicolas, elle organise un spectacle avec les autres classes et je danse en public avec mes camarades. Le thème devait être la ferme ou quelque chose du genre d’après les costumes. Saint-Nicolas m’apporte un train électrique Märklin avec lequel je joue beaucoup mais qui n’a jamais été fort développé alors que j’aurais bien aimé recevoir de nombreux rails et aiguillages. Mes parents combleront ce désir plus tard en m’offrant un train électrique en Lego que j’ai pu monter et démonter à ma guise.

Pendant l’hiver, je m’amuse bien avec mon papa qui fait un grand feu dans le fond du jardin pour brûler les feuilles mortes. Ma maman a dû me décrotter avec un grand bain, j’étais noire de suie !

A la fin de l’année scolaire, je suis super déçue: je dois quitter cette école alors que plein de nouveaux jeux (balançoires, toboggans…) viennent d’être installés. Qu’est-ce que j’ai râlé !

C’est à nouveau l’été et j’ai 6 ans ! Ma vie va sérieusement changer à l’automne !

5 years

(Après de longs mois d’interruption, je reprends la série sur « ma vie »).

Nous sommes en juillet 1976, je viens d’avoir 4 ans et j’ai mon premier souvenir: celui des mains froides de Mémé sur mes joues, une après-midi à l’ombre dans le jardin, en présence de mes deux tantes.

Cet été, je le passe comme tous les autres à moitié dans le jardin à la maison et à moitié dans la maison de mon autre grand-mère, Marraine, à la mer, à Middelkerke. Ma maman fait connaissance avec les voisins de plage, un étudiant en psychiatrie, sa femme, et leur petite fille de trois ans, Véronique. Nous commençons là une très longue amitié, construisant des châteaux de sables et jouant dans les vagues. Ma cousine Caroline est souvent là aussi, passant beaucoup de temps avec nous.

Au mois d’août, mes parents m’emmènent en city-trip aux Pays-Bas. Musées et monuments sont au programme mais aussi des activités adaptées à mon âge: la ville miniature de Madurodam, la crêpe géante sur la plage de Scheveningen, la ballade en bateau sur les canaux d’Amsterdam. Je pose une question récurrente: « où sont les moulins ?, vous m’aviez promis des moulins ! ». Je les entreverrai, à moitié endormie, sur le chemin du retour, au coucher du soleil…

Je rentre en deuxième maternelle, chez Madame Gilberte. Je me souviens juste qu’elle avait les cheveux courts avec toujours une belle mise-en-plis.

Mes parents avaient quelque peu interrompu leurs grands voyages mais en décembre, ils partent pour deux semaines en Inde du Sud et au Sri Lanka. Mon papa (ce grand explorateur) profite des congés scolaires pour guider des voyages culturels. Je suis mise en pension chez Marraine, à la mer. Elle ne s’en sort pas trop bien, heureusement que Tante Nine est là, mais à la fin des vacances, Marraine est seule avec moi et je tombe malade. Mes parents, à peine sortis de l’avion, viennent dare-dare à la mer mais l’autoroute est couverte de Verglas. A Furnes, ma mère demande à mon père d’arrêter la voiture, mais il persévère et arrive finalement à destination. Ma mère mettra plusieurs heures à démêler mes longs cheveux blonds que  ma grand-mère n’arrivait pas à maîtriser…

L’année se poursuit, suit son cours et nous revoici en juillet, en 1977, à mon anniversaire, pour mes cinq ans. Mon cadeau principal est une petite maison en tissu dans laquelle je jouerai de longues années. Sur la photo, j’ai mon air super sérieux, du genre « don’t mess with me, I know what I want ».

4 years

Le grand événement de l’année 1975 est le début des 15 ans de scolarité obligatoire. Le jour de la rentrée, ne sachant pas encore qu’elle serait coincée pour les années à venir, la petite fille était toute excitée. Elle tournait sur elle-même dans le hall d’entrée et ce qui devait arriver arriva: elle tomba sur un meuble et s’ouvrit la lèvre. La cicatrice, quoique quasi invisible, est toujours là. Pour la consoler, elle reçut un grand ours en peluche, Oscar.

Le midi, sa gardienne Mimi venait la chercher à pied et elles mangeaient ensemble. A 16h, c’est toujours elle qui venait la chercher, sauf si ses parents étaient libres plus tôt. Sa maman ne travaillait pas tout près, elle prenait le tout nouveau ring tous les jours pour aller au Heysel. Son papa par contre n’était qu’à 10 minutes en voiture.

En ce mois de septembre, elle reprit une habitude prise l’année précédente: elle demanda à son père des voyages dans le panier à pommes.

L’année fut calme, si on exclut quelques moments où la petite fille montra son caractère. Un jour, à l’école, dans la classe de Madame Monique, elle s’ennuyait, n’arrivait pas à se décider pour une activité et quand l’institutrice lui en imposa une, elle fit une sacrée crise. Madame Monique dut l’attacher à sa chaise pour la calmer, ce qui fut très mal pris par la maman, surtout quand elle retrouva des touffes de cheveux arrachés par la même occasion.

Sur la photo, prise en juillet 1976, on voit en arrière-plan les sapins de Noël plantés. Ils deviendront immenses… On y voit aussi que la petite fille porte des sandales Teko (achetées chez Dujardin bien sûr), une constante pour les 5 années à venir.

3 years

A partir de ses deux ans, la petite fille commença à parler, en néerlandais et en français. Elle mélangea et transforma quelques mots mais s’en sortit finalement très bien. Et ces mots sont restés dans les annales familiales: « celise » pour « cerise », « quaisin » pour « raison » et une jolie flamandisation: « hirondeeltje » à la place de « zwaluw ». Elle parlait surtout le néerlandais avec son papa et le français avec sa maman mais maîtrisait bien les deux langues.

Elle aimait quand son papa la promenait dans le grand panier à pommes au moment de la cueillette à la fin de l’été. Et elle aidait: elle ramassait les fruits tombés. Elle adorait aussi les fraises du jardin de Mémé; elle partait à la cueillette avec un petit panier.

Sa maman l’habillait chez Dujardin, le magasin des petites filles modèles de la bonne société bruxelloise. Elle portait donc robes à col claudine et motifs floraux à chaque sortie ou fête de famille. Heureusement, pour jouer, sa maman lui avait aussi choisi pantalons et pulls divers, typiques de la mode de l’époque.

Ses cheveux blonds comme les blés devenaient de plus en plus longs. Souvent, ils étaient retenus en queue de cheval mais parfois, juste une pince colorée les ornait.

A trois ans, c’était déjà une grande fille, prête pour l’école mais cette histoire sera contée dans le prochain épisode.

2 years

Comme toutes les années qui suivraient, la petite fille passa ses vacances d’été à la mer du Nord, dans la gigantesque maison de sa grand-mère. Au début, le sable n’était pas sa matière préférée mais elle s’habitua vite. Elle était bien entourée: son père et sa mère, enseignants, étaient là tous les jours. La grand-mère s’occupait de la cuisine et du tricot. Ses cousines maternelles étaient souvent présentes. Elle développa une relation particulière avec la plus jeune des deux (qui était pourtant plus âgée de 7 ans). C’est dans cette maison qu’elle fit ses premiers essais musicaux sur le piano.

Comme le montre la photo, elle développa très vite un intérêt pour le jardinage. On remarquera la mode typique des années 70, avec des couleurs intenses comme le jaune (ou sur d’autres photos, du vert, du brun, de l’orange).

En septembre, elle eut une relation amoureuse intense mais de courte durée: elle rencontra un petit garçon au parc des sculptures de Middelheim. Mais peut-être était-ce le jouet en forme de camion qui l’attira surtout…

Elle était très timide et passa une partie de la fête de Noël chez ses cousins paternels à pleurer. Ils étaient nombreux, six, et tous plus grands qu’elle, et cinq garçons ! Elle n’était pas habituée à toute cette agitation et ce bruit.

Ensuite, elle partit pour une semaine avec ses parents à Ténérife. Le voyage ne fut pas une sinécure: il fallut douze heures pour y arriver, en passant par Londres et Madrid, à une époque où les places dans l’avion n’étaient pas encore numérotées et où les femmes avec jeunes enfants ne recevaient pas la priorité. Elle découvrit le sable noir de la plage locale et les fleurs exotiques. Le maître d’hôtel du restaurant l’adorait et paradait avec elle dans ses bras.

Le reste de l’année passa sans encombres, elle grandissait bien et s’intéressait à beaucoup de choses. Toujours aussi potelée, elle reçut le petit nom de « bouboule » de sa maman et de « boontje » (petit haricot) de son papa.

1 year

Une semaine après la naissance de la petite fille, le couple la ramena à la maison, dans les quartiers verts près de Bruxelles. Posant le couffin sur la table de la salle à manger, ils se regardèrent. Le jeune père demanda: -« Qu’avons-nous fait ? ». La jeune mère se posait la même question. Ensemble, ils décidèrent qu’ils feraient pour le mieux et apporteraient tout leur amour à cette petite fille.

Les débuts furent difficiles: la petite fille n’aimait pas dormir et pleurait beaucoup. Le père l’entendait de loin quand il rentrait à la maison après une longue journée d’enseignement de la géographie et de l’histoire. La mère promenait inlassablement le landau dans le jardin. Au moindre arrêt, le bébé se remettait à pleurer.

Elle fut baptisée en septembre, un peu par convention. Les parents n’étaient pas pratiquants mais toute la famille était de tradition catholique. La petite pleura, hurla même quand l’eau froide fut renversée sur sa tête. Son oncle et sa tante furent nommé parrain et marraine, son deuxième prénom fut donné en souvenir de la première femme du père.

Après quelques mois, la mère dut retourner à son travail d’enseignante de l’autre côté de la ville. Elle mis la petite à la crèche mais fut malheureuse comme les pierres. Le bébé refusa de boire son lait après cette première journée de travail et recracha tout en représailles. Les jeunes parents cherchèrent une autre solution. Ils trouvèrent une gardienne, l’épouse d’un collègue du père. Elle s’occupa du bébé puis du jeune enfant jusqu’à son entrée à l’école primaire.

A un an, c’était déjà une grande fille aux bonnes joues rondes qui se tenait debout et qui commençait à marcher. Le début d’une grande période de curiosité: le cartable du père fut de nombreuses fois fouillé et à la plage, les voisins étaient bien plus passionnants !

40 years ago

Il était une fois une femme célibataire depuis trop longtemps, elle avait déjà 37 ans. Elle portait des mini-jupes et roulait en Triumph. Un homme, son collègue au cours du soir, s’arrangeait toujours pour garer sa voiture derrière la sienne. Lui aussi avait été malheureux en amour, sa première femme était décédée après quelques années de mariage. Il était plus jeune de six ans. Ils tombèrent amoureux et se marièrent en décembre 1970, lors d’une sombre journée. Le photographe fit de très belles photos gothiques devant l’église ancienne. Ils voulaient tous les deux un enfant, c’était d’ailleurs la condition de l’homme pour se marier. La femme ne pouvait rien promettre mais en désirait un aussi. Ils essayèrent pendant onze mois. Le jour où ils avaient rendez-vous chez le médecin pour un traitement de fertilité (on ne parlait pas encore de FIV en 1971), celui-ci annonça une bonne nouvelle. La femme était enceinte. Elle fut malade les premières semaines, elle ne put pas aller voir le Sacre du Printemps de Maurice Béjart. Après sept mois, le médecin la renvoya se coucher immédiatement, l’ouverture était déjà trop grande. Rien n’était prêt ! Elle ne put faire les courses nécessaires que les derniers jours. Tout le monde la regarda se dandiner dans le centre commercial avec son gros ventre. Le médecin, qui ne voulait pas reporter ses vacances, décida que le bébé était bien assez gros et programma l’accouchement un lundi de juillet. Le dimanche, l’homme et la femme allèrent manger chez la future grand-mère. Celle-ci proposa avec insistance des réserves de soupe et autres victuailles mais elles furent refusées. Le couple ne voulait pas annoncer la naissance du bébé. Le lundi matin, l’homme et la femme firent pour la dernière fois à deux la route entre leur domicile et Louvain. La journée serait longue. Et caniculaire. L’homme la passa à faire des mots-croisés, s’inquiétant de temps en temps de la situation. A cette époque, les hommes n’étaient pas admis en salle d’accouchement. Finalement, en fin d’après-midi du 17 juillet, vers 17h30, en même temps que des orages, le bébé vit le jour, une petite fille…

un mois plus tard, en août

(il n’existe pas de photos du mois de juillet, l’appareil photo était cassé)