At the movies – 74 (2020s)

Are You Lonesome Tonight ? de Wen Shipei

Les pionniers de la musique de film. Le son de l’Europe pour Hollywood, Florian Caspar Richter (Allemagne, 2023) – 3/5: ce documentaire d’une cinquantaine de minutes s’intéresse dans sa première partie à trois grands noms de la composition de musique de film, Franz Waxman, Max Steiner et Erich Wolfgang Korngold. Ils ont tous les trois quitté l’Europe dans les années 1920 et 30 et révolutionné l’accompagnement des films. Dans la seconde partie, le documentaire parle de compositeurs actuels allemands qui se sont fait un nom à Hollywood, avec un court passage sur John Williams et Jerry Goldsmith. Toute cette partie est beaucoup moins à propos, oubliant une série d’éléments dans l’évolution des musiques de film. Hans Zimmer par exemple n’est cité qu’avec une musique toute récente alors qu’il était déjà très actif dans les années 1980, période où le documentaire met en avant Harold Faltermeyer. Je connais pas mal le sujet et je suis restée sur ma faim. Par contre, c’était très intéressant de voir les archives à propos des trois premiers compositeurs.

Tuer l’Indien dans le cœur de l’enfant, Gwenlaouen Le Gouil (France, 2021) – 4/5: déjà vu à sa sortie, j’ai proposé d’écrire une courte notice pour le boulot et donc j’ai préféré le revoir. Ma note a baissé d’un point, mais cela n’enlève rien à la qualité de ce documentaire, j’ai juste été moins surprise et j’ai depuis beaucoup appris et lu sur le sujet. Il y a deux grandes parties: la mise en pensionnat obligatoire des enfants autochtones, avec pour but d’effacer avec violence leur culture et le problème des féminicides. (vu pour le boulot)

Are You Lonesome Tonight ?, Wen Shipei (Chine, 2021) – 4/5: Xueming (Eddie Peng) renverse un homme avec sa camionnette pendant la nuit. Il propose ses services comme réparateur d’air conditionné à la veuve, Madame Liang (Sylvia Chang), et se rapproche d’elle. Mais l’histoire semble plus compliquée que ça, et se dévoile par petites touches. Certaines scènes sont montrées plusieurs fois, sous un autre angle, ajoutant des éléments à l’histoire. C’est parfois un peu confus mais le côté déconstruit ne m’a pas dérangée. C’est un film néo-noir, sombre et coloré à la fois – les couleurs des néons sont exploitées à l’extrême (et j’aime ça). Il y a aussi ces ambiances particulières de certains films asiatiques.

Fallen Leaves, Aki Kaurismäki (Finlande, 2023) – 4/5: Ansa se fait virer du supermarché où elle travaille, Holappa est ouvrier et alcoolique. Ils se rencontrent un soir à un karaoké. Leur vie n’est pas très rose mais le film n’est pas triste non plus. Juste très mélancolique, très finlandais, avec des chansons romantiques douces-amères. Les ambiances sont un peu glauques, les néons blafards assez présents (comme dans certains films asiatiques). J’aime ce type de film et pourtant ça fait des années que je n’avais plus vu un film de Kaurismäki, et même comme ça, je n’en ai vu que très peu. Il faudra que je remédie à cela.

Ferrari, Michael Mann (2023) – 2/5: un épisode dans la vie du constructeur automobile Enzo Ferrari (Adam Driver), en 1957, au moment où son épouse (Penélope Cruz) découvre qu’il a une relation et un enfant avec une autre femme (Shailene Woodley). J’ai détesté les deux femmes, la première faisant la moue tout le temps, la seconde étant très effacée, mais surtout aucune des deux n’a le style de vêtements, coiffure et maquillage des années 1950 et ça m’a fortement dérangée. Pour le reste de l’histoire, on voit des courses de voitures. Un film que j’ai vu à cause d’Adam Driver, mais même lui est sans intérêt (et il devrait arrêter de jouer des Italiens). #theAdamDriverFilmography

Sambre, Jean-Xavier de Lestrade (France-Belgique, 2023) – 4/5: une mini série en six épisodes basée sur le livre d’Alice Géraud. Il s’agit ici d’une fiction inspirée des faits réels (l’histoire du violeur de la Sambre), et ce n’est pas plus mal, cela permet de mettre en avant certaines choses. J’avais un peu peur en commençant la série de ne pas être surprise vu que j’ai lu le livre, mais j’ai beaucoup aimé le découpage qui met six personnes en avant, de la première victime au violeur lui-même. C’est sombre et glaçant.

Poor Things, Yorgos Lanthimos (2023) – 3/5: Bella (Emma Stone) a été ressuscitée par un scientifique bizarre (Willem Dafoe); il lui a greffé le cerveau de son futur bébé. On la suit alors qu’elle grandit et découvre sa sexualité. C’est un film très bizarre, filmé avec des caméras qui déforment l’image, dans des décors somptueux rappelant l’Art Nouveau. Bella porte des costumes superbes, aux manches ballon, dans des tissus vaporeux ou justement très structurés (j’ai bavé). Mais je n’ai absolument accroché, j’ai même trouvé le temps long; les scènes de sexe sont trop multiples et rendent le personnage assez unidimensionnel dans sa découverte de la vie d’adulte. Il y a plein d’autres choses, notamment la question du consentement, mais je n’ai pas le temps ni l’envie de m’étendre ici.

At the movies – VIII (2020s)

Début février, j’ai décidé de rajouter certains documentaires à ces articles, tout particulièrement ceux qui passent au cinéma. Mais on commence avec des films vus en décembre (ce système de classer les films par décennies provoque évidemment de longs délais de publication, mais je n’ai pas envie de publier juste par orde chronologique de visionnement). Je commence aussi une série de # assez divers, selon mes intérêts du moment: (re)voir tous les films d’un acteur ou les femmes cinéastes (lié au livre d’Alicia Malone que je viens de lire).

Sisters with Transistors

Annette, Leos Carax (France, 2021) – 4/5: premier film en anglais du réalisateur français, avec Adam Driver, Marion Cotillard et Simon Helberg (qu’on connaît de The Big Bang Theory). C’est un rock opéra composé par les Sparks, on reconnaît leur style un peu décalé, avec des morceaux à la musique parfois un peu répétitive et qui ne varient pas beaucoup. L’histoire aborde des thèmes comme la difficulté d’être une star, la masculinité toxique, l’exploitation des enfants et le désir de tuer comme catharsis. J’ai été un peu déroutée au début (je hais les marionnettes par exemple) mais je me suis laissée emporter et je sais que ce film restera longtemps gravé dans ma tête. Le pire, c’est que je ne l’aurais probablement pas vu s’il n’y avait pas Adam Driver en rôle principal. A noter: ça a été tourné en partie en Belgique (tous les théâtres et la forêt de Soignes), et on voit apparaître Wim Opbrouck, qui présente notamment Bake Off Vlaanderen (et aussi Angèle mais je ne l’ai pas repérée). Et un autre bon point: Marion Cotillard a huit ans de plus qu’Adam Driver, inversant cette norme dépassée que l’homme doit être bien plus âgé que la femme dans les films (j’ai déjà noté ça dans le passé, et je risque bien de continuer). #theAdamDriverFilmography

The Matrix Resurrections, Lana Wachowski (2021) – 3/5: très attendu mais un peu décevant quand même (edit de quelques mois plus tard: mais très bien quand même). J’ai beaucoup aimé la première heure, avec une critique à peine voilée des studios qui voulaient absolument une suite aux trois premiers films – parce que les sequels ça rapporte et ne demande pas trop d’imagination. Par la suite, le film se perd un peu, les scènes d’action sont pas mal mais pas extraordinaires, et le ton devient plutôt romantique. Les tons verts prédominants des trois premiers films ont été abandonnés et c’est beaucoup plus coloré, et j’ai eu l’impression de regarder un film de super-héros. Mais ça fait plaisir de revoir Keanu Reeves (même s’il a l’air fatigué pendant tout le film) et Carrie-Anne Moss ensemble. #theKeanuReevesFilmography #52FilmsByWomen

The Green Knight, David Lowery (2021) – 3/5: je ne savais rien sur ce film avant de le commencer, et malheureusement, je ne connaissais pas non plus le roman de chevalerie duquel il est adapté, ni même toutes les histoires arthuriennes. Du coup, il m’a laissée assez perplexe. Et comme il est assez long et relativement contemplatif, je me suis même ennuyée par moments. C’était apparemment le but du réalisateur David Lowery de déconstruire la tradition et c’est assez réussi à ce niveau-là. Il y a un peu trop d’étalonnage turquoise/orange à mon goût, mais par ailleurs, les images sont superbes. Et Dev Patel juste fantastique.

C’mon C’mon, Mike Mills (2021) – 4/5: Johnny (Joaquin Phoenix) propose à sa soeur (qui vit à Los Angeles) de s’occuper de Jesse, son fils de 9 ans, pendant que celle-ci prend soin de son mari psychotique. Il réalise un documentaire sonore sur les aspirations des enfants et adolescents, et comme il ne peut interrompre son travail plus longtemps, il propose à Jesse de l’accompagner à New York. Oncle et neveu se découvrent, non sans difficultés – Jesse est un enfant précoce et parfois un peu bizarre. Si l’histoire est touchante, j’ai été tout particulièrement emballée par les choix du réalisateur: filmer dans un noir et blanc un peu brumeux, mais tout en donnant aux quatre villes visités (Detroit, Los Angeles, New York, La Nouvelle-Orléans) un ton propre, et mettre l’accent sur le son – Johnny apprivoise Jesse en lui prêtant son enregistreur et en lui apprenant les techniques de prise de son. Le film aborde la maladie mentale et la parentalité, tout particulièrement le rôle des mères et leur épuisement face à leurs trop nombreuses tâches. J’ai bien envie de voir les trois autres films de Mike Mills, du coup (edit: c’est fait, et j’ai adoré). Un critique plus longue et plus construite a été publiée sur le site de mon boulot.

Death on the Nile, Kenneth Branagh (2022) – 2/5: un film de divertissement qui s’écarte un peu de l’histoire originale, notamment pour y insérer un casting plus divers (deux actrices noires, check, un acteur indien, check) et pour raconter l’origine de la moustache de Poirot (j’ai cru que j’étais dans la mauvaise salle au début du film). Certains costumes sont réussis, d’autres sont trop modernes, tout particulièrement ceux d’Emma Mackey (je n’avais pas reconnu Maeve de Sex Education) qui font penser au glamour des années 1980. Tourné quasi entièrement en studio, ça donne malgré tout une belle impression de l’Egypte, mais la version de 1978 (avec ses costumes des années 1930 au look seventies) est quand même bien plus réussie. Un critique plus longue et plus construite a été publiée sur le site de mon boulot.

Compartment n°6, Juho Kuosmanen (Finlande, 2021) – 3/5: Laura prend le train de nuit (et de jour – le voyage dure longtemps) pour Mourmansk où elle veut voir des pétroglyphes. Son compartiment est occupé par Ljoha, un mineur rustre et complètement saoul quand elle arrive. Progressivement, le courant passe entre eux. Je n’ai pas aimé le personnage de Laura, elle est quelconque (ce qui n’est pas le souci) mais surtout, elle reste fade, on dirait qu’il n’y a pas de vie en elle. Il y a quelque chose dans la fin, dans cet élan de bonté, mais je suis restée sur ma faim – peut-être que le roman de Rosa Liksom est plus intéressant. A noter: les images de nuit, la lumière douce dans le train, froide, dans les villes – les néons dans le cercle arctique, c’est clairement quelque chose pour moi. Et il y a un chat et les paysages russes.

Sisters with Transistors, Lisa Rovner (2020) – 4/5: ce documentaire disponible sur Arte (hiver 2022) s’intéresse aux femmes qui ont composé de la musique électronique à partir de bandes, transistors et des premiers ordinateurs. Beau portrait de femmes pionnières comme Delia Derbyshire, Clara Rockmore, Bebe Barron ou encore Eliane Radigue avec beaucoup d’images d’archives inédites. #52FilmsByWomen