La huitième vie

Nino Haratischwili, La huitième vie: Géorgie, 1917. Stasia rêve de devenir danseuse étoile à Paris, dans les Ballets Russes, mais son père, un chocolatier renommé (et avec une recette secrète), la pousse à épouser Simon Iachi, un brillant officier. Mais la révolution bolchevique passe par là et les vies de la famille sont complètement secouées..

Allemagne, 2006. Brilka, l’arrière-petite-fille de Stasia a fugué et sa tante part à sa recherche, tout en décidant de lui raconter l’histoire de sa famille. Celle-ci a traversé le 20e siècle et la domination communiste de la Géorgie. Même si les hommes ont fait des choix et ont pu apporter leur soutien grâce à des postes élevés dans le parti communiste, ce sont les femmes qui sont au centre de l’histoire: Stasia, l’ancienne danseuse, sa soeur Christine, Kitty, Elene, Daria, Niza et Brilka. Ce sont des personnages forts, à qui il arrive beaucoup de choses, heureuses et malheureuses, tandis que les hommes restent en retrait, gardant un rôle assez figé, tandis que les femmes évoluent, changent et (sur)vivent dans un monde troublé.

Avec ce roman, l’autrice géorgienne Nino Harastischwili, aujourd’hui installée en Allemagne (elle écrit d’ailleurs en allemand), raconte toute l’histoire de son pays. Dans le documentaire à son propos sur Arte, elle explique d’ailleurs que ce n’était pas sa première idée; elle voulait surtout raconter l’histoire des années 1990 mais pour cela, il lui semblait important de raconter d’abord le reste du 20e siècle. Le roman traverse les décennies et la famille de Stasia se trouve mêlée à tous les événements importants de l’histoire, de la révolution bolchevique à la Seconde Guerre mondiale, en passant par les grandes purges de Staline et l’arrivée de Gorbatchev. C’est parfois un peu trop et il arrive aux femmes de chaque génération des choses assez horribles. Haratischwili n’a pas peur de pousser les émotions jusqu’au bout, rendant le récit très mélodramatique. En même temps, une fois qu’on est absorbé dans la lecture de ce pavé, cette accumulation d’histoires est passionnante et j’ai tourné les pages avec beaucoup de plaisir, apprenant au fur et à mesure beaucoup de choses sur la Géorgie et la vie quotidienne pendant la période communiste.

Je suis curieuse de lire son roman suivant, Das mangelnde Licht, qui n’est pas (encore) traduit en français et qui suit l’histoire de quatre adolescentes dans les années 1990 à Tbilissi. C’est aussi un pavé. (Si je n’ai pas la patience d’attendre la traduction française, je me tournerai vers celle en néerlandais).

L’avis de Livr’escapades.

Ceci est ma seconde participation aux challenge des pavés de l’été de Sibylline (La petite liste) mais aussi des épais de Ta d loi du cine (Le blog de Dasola).

Nino Haratischwili, La huitième vie, Folio, 2021, 1200p. (traduit de l’allemand par Monique Rival et Barbara Fontaine, titre original: Das achte Leben (Für Brilka), 2014)

14 réponses sur « La huitième vie »

  1. Bravo pour la lecture de ce pavé ! Il est sur ma pile et cela doit faire 3 ans que je projette de le lire pour les Feuilles allemandes, mais je remets chaque fois à plus tard.. peut-être le glisserai-je dans ma valise (mais j’y ai déjà mis deux gros pavés..).

    1. Un point positif: il se lit vite. Et dans mon cas, c’est parce que je reviens d’un voyage en Géorgie et que je voulais en savoir plus du pays et de sa littérature.

  2. Bonjour Sunalee
    J’ignorais l’existence de ce livre ni de son auteure, merci!
    Pour moi, la Géorgie, c’est la nationalité d’origine de Staline (mais je ne sais pas si elle a eu lieu de s’en féliciter?), ou, à partir des années 1990, celle d’Edouard Chevarnadze dont la presse française parlait beaucoup sous Gorbatchev.
    Pour brosser le contexte de neuf décennies d’une histoire agitée, je suppose qu’il fallait bien 1200 pages, si ces années sont vues à travers les yeux de différents personnages…
    Grâce à la parution de ton billet, j’aurai appris que le suffixe « -schwili » signifie chez les Géorgiens « fils de » (correspondant au « -vitch » russe ou au « -son » scandinave).
    Bravo pour ta capacité à lire en néerlandais! Pour moi, je n’ai jamais été doué pour les langues, et la « version » de quelques pages en « langue vivante » (depuis l’allemand) dans le cadre de mes études était toujours une souffrance, alors lire volontairement tout un bouquin en langue étrangère (et le savourer!), j’en serais bien incapable.
    En suivant le lien que tu indiques, je vois que l’on trouve des appréciations chaleureuses pour « ce mastodonte » [qui] « permet de comprendre la Géorgie de l’intérieur ».
    Voilà une belle et bonne deuxième participation aux « challenges estivaux » sur les « gros bouquins ». Ses 1200 constituent pour le moment un record (à battre d’ici au 21 septembre?).
    (s) ta d loi du cine, « squatter » chez dasola

    1. La Géorgie est en effet le pays de Staline, dans sa ville de naissance, Gori, il est toujours célébré – ailleurs beaucoup moins. Je me souviens aussi de Chevarnadze, et je voudrais encore rajouter que la présidente actuelle, Salomé Zourabichvili, a été ambassadrice pour la France en Géorgie, à l’époque de Chirac.

      Nino Haratischwili vivant maintenant en Allemagne, le suffixe s’écrit avec un « w », en français, on écrira plutôt « vili ». D’ailleurs les noms des personnages dans le livre ont été traduits en français: Iachi plutôt que Jashi.

      A vrai dire, je lis le plus vite en français, puis en anglais, puis en néerlandais (je suis Belge et viens d’une famille bilingue).

      Je me demande si je pourrai tenir le record ! Mes prochains pavés sont bien plus courts…

      1. On m’a signalé très récemment l’existence d’un vénérable « Défi des 1000 pages » lancé en 2011 sur l’ancien blog de Fattorius, mais apparemment toujours d’actualité sur son nouveau! Je pense pour ma part réussir bientôt à chroniquer un « épais volume » de 1026 pages, mais si le coeur vous en dit de vous y signaler en rajoutant le logo…?
        http://fattorius.blogspot.com/search/label/Défi%20des%20Mille
        (s) ta d loi du cine, « squatter » chez dasola

  3. Mazette, 1200 pages quand même … Pas pour moi cet été ! Mais, je retiens le nom de l’autrice et je vais jeter un oeil sur le documentaire. Merci de la découverte.

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