At the movies – 44 (1930s)

Alexandre Nevski de Sergueï Eisenstein

Captain Courageous, Victor Fleming (1937) – 3/5: Harvey (Freddie Bartholomew), fils d’un des hommes d’affaires les plus riches des Etats-Unis est renvoyé de son école pour cause de tromperies et manigances. Son père qui ne s’est jamais occupé de lui décide de l’emmener en Europe. Harvey tombe du paquebot et est sauvé par des pêcheurs. Il passera plusieurs mois avec eux, partageant leurs activités et apprenant à vivre différemment. J’ai failli abandonner: la première demi-heure suit un ado gâté pourri et insupportable. C’est une fois sur le bateau de pêche que le film devient intéressant. Harvey reste tout aussi insupportable mais Victor Fleming devient documentariste, filmant la vie quotidienne des pêcheurs au cabillaud entre les bancs de sables du Newfoundland. C’est ce qui rend le film intéressant, le scénario étant plutôt bancal, et Spencer Tracy en marin portugais n’est pas très crédible. Avec aussi Lionel Barrymore en capitaine. A noter aussi la superbe course entres voiliers dans une mer assez démontée.

The Prisoner of Zenda, John Cromwell (1937) – 3/5: je me suis dit en commençant ce film: encore un machin historique un peu chiant quelque part dans le passé récent de la Mittel Europa de l’époque. Le prince héritier doit être couronné le lendemain, mais il est drogué par son frère jaloux (Raymond Massey, que je commence à apprécier de plus en plus) et incapable d’assister à la cérémonie. Heureusement se trouvait là Rudolf Rassendyll (Ronald Colman), Anglais et cousin éloigné du prince, mais surtout son sosie parfait. Il prendra donc sa place et se retrouvera mêlé contre son gré à cette aventure. Il y a de belles scènes de combats d’épée dans un château aux ombres et lumières très étudiées, il y a du romantisme dégoulinant (avec Madeleine Carroll en princesse) et surtout un méchant très méchant, l’acolyte du prince joué par Douglas Fairbanks Jr. A noter: la musique d’Alfred Newman, il n’y a pas de chat mais bien une référence à un chat qui serait la cause d’un bruit inopiné.

Pépé le Moko, Julien Duvivier (France, 1937) – 3/5: Pépé le Moko (Jean Gabin), criminel aguerri et recherché par la police, se cache dans la casbah d’Alger, soutenu par divers amis. Il a une compagne, Inès (Line Noro) mais tombe amoureux de la belle touriste française Gaby (Mireille Balin). On y retrouve des éléments du film noir (avant que le style n’explose vraiment) mais aussi de Morocco avec Marlene Dietrich dans les ombres et lumières. Le film est superbe mais je ne peux pas lui donner une cote plus élevée: il y a une dose de whitewashing avec des acteurs français jouant des Algériens et des commentaires sérieusement racistes par moments (notamment à propos de la musique « indigène » qui n’est pas très agréable à écouter). D’un autre côté, il y a deux compositeurs pour la musique, un Français, Vincent Scotto, et un Kabyle, Mohammed Iguerbouchène qui a écrit une musique très locale et très marquée par les traditions du music-hall algérien de l’époque. A noter: un second rôle pour la chanteuse française Fréhel. Et je comprends mieux l’aura de Jean Gabin après ce film, son rôle reste dans les esprits.

Stella Dallas, King Vidor (1937) – 4/5: Stella (Barbara Stanwyck) est une jeune femme issue de la classe ouvrière; elle épouse Stephen Dallas qui est d’une classe bien plus aisée, mais très vite, après la naissance de leur fille Laurel, le couple s’éloigne. Stella n’arrive pas à s’adapter à son rang et reste très vulgaire. Elle fait tout pour sa ville qu’on voit grandir, mais sa vulgarité met des bâtons dans les roues de vie de l’adolescente. J’ai été touchée par cette histoire d’une mère qui se sacrifie par amour pour sa fille, sans doute un peu plus que je n’aurais dû. Il y a en effet des passages pas du tout crédibles dans le film, comme les tenues et surtout les coiffures de Dallas qui deviennent de plus en plus extravagantes et laides, mais peu importe.

Ceci termine les films de 1937 et cela ne m’a pas semblé aussi interminable que 1936, même si j’ai eu l’impression de traîner vers la fin. Mes films préférés sont les screwball comedies, et Un carnet de bal. C’est aussi l’année où j’ai introduit le terme de white washing mais j’aurais déjà pu le faire auparavant; disons que ça m’a tout particulièrement marquée ici. 1938 est une des années où ma liste est assez courte, moins de vingt films.

The Adventures of Robin Hood, Michael Curtiz (1938) – 3/5: tout le monde connaît les aventures de Robin des Bois, popularisées par ce film mené par Errol Flynn (et avec Olivia de Havilland). Il y a de l’action, des combats, des poursuites, le tout dans les couleurs hyper saturées du Technicolor de l’époque. Mon regard a surtout été attiré par les collants verts de Robin et sa troupe, par les paillettes sur le premier costume de Robin, par la perruque trop stylée du roi Jean, et par les costumes en lamé de Lady Marian. Je n’ai sans doute pas apprécié ce film autant que je l’aurais dû vu son succès au fil des ans et Errol Flynn me laisse de marbre. A noter: la musique d’Erich Wolfgang Korngold.

Pygmalion, Leslie Howard & Anthony Asquith (Royaume-Uni, 1938) – 3/5: le professeur Higgins (Leslie Howard) est linguiste et spécialiste des accents britanniques qu’il reconnaît à quelques rues près. Un soir, en rue, il rencontre Eliza Doolittle (Wendy Hiller), vendeuse de violettes qui parle le plus pur cockney de Covent Garden. Il décide d’en faire une dame de la société, lui apprenant l’étiquette, les bonnes manières et l’accent british. Il est assisté par son ami, le Colonel Pickering (Scott Sunderland). C’est l’adaptation d’une pièce de théâtre et ça se sent, mais il est intéressant de voir comment le personnage d’Higgins est centré sur lui-même et rudoie la pauvre Eliza pour obtenir de meilleurs résultats. [spoiler] Mais il est aussi très jouissif de voir comment celle-ci se défend (même si c’est uniquement dans les dernières scènes). Avec une musique d’Arthur Honegger, les costumes avec cardigan en laine sous la veste de Leslie Howard et des robes de Schiaparelli et Worth.

Alexandre Nevski (Sergueï Eisenstein, URSS, 1938) – 4/5: Alexandre Nevski, valeureux guerrier, doit se battre contre les chevaliers teutons (aux superbes casques) qui ont envahi la Russie, le tout au coeur de l’hiver (alors que le film a été tourné en été). Noter ce film a été un peu compliqué: d’un côté, il y a la propagande anti-allemande et le patriotisme non voilé, ainsi que des scènes un peu trop longues et une narration trop linéaire, d’un autre, il y a la beauté fulgurante de certaines des images – et au final, c’est ce qui l’emporte pour moi. A noter aussi, la composition de Sergueï Prokofiev.

At the movies – 30 (1930s)

Clark Gable dans Mutiny on the Bounty (domaine public)

The 39 Steps, Alfred Hitchcock (Royaume-Uni, 1935) – 4/5: une histoire d’espionnage, et d’un homme (Robert Donat) qui s’y trouve mêlé par hasard, avec beaucoup d’action et de revirements de situations, et une blonde hitchcockienne (Madeleine Carroll). Filmé dans les rues de Londres mais aussi en Ecosse. J’ai été scotchée du début jusqu’à la fin (même le dénouement est un peu précipité, à une minute de la fin du film – une constante dans les films anciens).

Captain Blood, Michael Curtiz (1935) – 3/5: un film de cape et d’épée, avec des pirates et des batailles navales – tout ce qu’il faut pour ne pas s’ennuyer. Errol Flynn prend le rôle du Capitaine Blood, médecin anglais envoyé comme esclave en Jamaïque. Il devient pirate et capitaine d’un navire. Il avait été acheté par Arabella Bishop, jouée par Olivia de Havilland, et évidemment, ils sont attirés l’un par l’autre. Les deux acteurs sont ici réunis pour la première fois et sont au tout début de leur carrière. Le film mélange scènes d’action (certaines viennent d’un film muet de 1924, The Sea Hawk) et romantisme dégoulinant, le tout appuyé par le score d’Erich Wolfgang Korngold. Certaines scènes sont totalement invraisemblables (Blood attaque deux bateaux, mais commence par celui à sa droite. Celui de gauche attend sagement sans rien faire) et la robe en satin d’Arabella sort de toutes les scènes d’action sans une poussière ou un pli. Ce film m’a beaucoup fait penser à la série Black Sails.

Ruggles of Red Gap, Leo McCarey (1935) – 2/5: Marmaduke Ruggles est le valet et majordome du comte de Burnstead, mais ce dernier le perd au jeu à Paris et il doit rejoindre le couple américain Egbert et Effie Floud qui l’emmènent à Red Gap, dans l’Ouest lointain des Etats-Unis. C’est un film qui met en avant le contraste entre la rigidité toute anglaise et le caractère totalement décomplexé des Américains, avec une bonne dose de patriotisme étatsuniens (Ruggles récite un long discours de Lincoln sur le fait que les hommes sont égaux). Ce n’est pas le film le plus passionnant du monde et il est très cliché. A noter: des vues de Paris, un train, le restaurant chinois est un restaurant de chop suey, une cage à oiseau (on ne voit pas s’il y a un canari dedans).

Top Hat, Mark Sandrich (1935) – 3/5: un autre film du duo Fred Astaire – Ginger Rogers, sur un scénario proche de The Gay Divorcee, basé sur un quiproquo (chose que mon esprit très rationnel a du mal à accepter sur la longue durée). Les morceaux de danse sont superbes (mais il n’y en a pas tant que ça), avec notamment la chanson « Cheek to Cheek », pendant laquelle Rogers porte une robe à plumes d’autruche qui virevoltent (on voit les traces sur le sol). Les décors sont exagérés et clairement en carton-pâte, représentant d’abord un hôtel de luxe à Londres, puis le Lido à Venise, avec son hôtel art déco. Je ne me suis pas ennuyée mais ce genre de film est très cliché, et l’histoire n’est qu’un prétexte pour les morceaux dansés. A noter: un des personnages commande un Horse’s Neck, un cocktail à base de whisky et ginger ale.

Mutiny on the Bounty, Frank Lloyd (1935) – 3/5: un film historique qui prend de grandes libertés avec l’histoire (le capitaine Bligh était sévère mais apparemment pas aussi extrême) mais qui est très divertissant. Charles Laughton (Bligh) ressentait une certaine infériorité par rapport à son physique face à Clark Gable (sans moustache parce que c’était interdit dans la marine anglaise de l’époque), et en effet, le contraste est vraiment énorme. Une des jeunes filles tahitiennes est en fait mexicaine, mais l’autre est hawaïenne – on se rapproche donc. Les scènes de mer sont spectaculaires et le film a en partie été tourné à Tahiti et en Polynésie Française. J’ai hésité à monter ma note à 4 mais le côté cliché des bons et du mauvais est un peu trop énorme – cela reste malgré tout un bon film pour l’époque (apparemment pour la réalité historique, il faut se tourner vers The Bounty de 1984 avec Mel Gibson et Anthony Hopkins).

The Informer, John Ford (1935) – 4/5: a priori un film se passant en Irlande, ça ne m’intéresse pas trop (je ne sais pas trop pourquoi le sujet ne me passionne pas), mais ici, on sent la patte de John Ford (d’origine irlandaise). Le personnage principal, Gypo (Victor McLaglen) est d’une pauvreté extrême. Pour réaliser ses rêves et celui de sa jeune amie, il dénonce son ami recherché pour meurtre à la police anglaise, le tout pour 20£, qu’il dépense ensuite sans compter alors qu’il est en plein déni de ce qu’il a fait. Toute l’action se déroule en quelques heures, la nuit, dans des décors sales et sombres. Il y a de nombreuses références au cinéma muet et aux films de l’expressionnisme allemand (comme M le maudit). Max Steiner a composé une bande-son qui suit l’action au plus près (un exemple type de mickeymousing).

The Devil is a Woman (Joseph von Sternberg, 1935) – 3/5: dernière collaboration entre Josef von Sternberg et Marlene Dietrich, (leur relation était devenue trop compliquée), cette espagnolerie (comme une chinoiserie mais en Espagne) est confuse au niveau de l’histoire. Je n’ai pas aimé le portrait qu’on fait de cette femme manipulatrice et profiteuse alors que les hommes sont montrés comme des victimes (sauf cette détestable scène où un homme bat la femme jouée par Dietrich – hors plan, mais quand même). Par contre, la lumière, le jeu du clair-obscur est magnifique et les plans très travaillés. A noter: les fêtes du Carnaval et les gens masqués, un train, les costumes hispanisants très inventifs (la cape à mini pompons !).