At the movies – 33 (1930s)

Le roman d’un tricheur, Sacha Guitry

Dodsworth, William Wyler (1936) – 4/5: Samuel Dodsworth (Walter Huston) prend sa retraite après une carrière très réussie dans l’industrie de l’automobile. Il décide avec son épouse Fran (Ruth Chatterton) de faire un voyage en Europe. Cette dernière est beaucoup plus jeune que lui (elle a la quarantaine) et se laisse courtiser par divers hommes sur le bateau et à Paris, oubliant totalement son mari. Au début, Sam subit cette situation mais au fil du temps, il décide de ne plus se laisser faire par cette épouse très superficielle. L’histoire est intéressante, même si c’est la femme qui a le mauvais rôle, et j’ai aimé le fait que les protagonistes voyagent, allant des Etats-Unis en Europe (en prenant le Queen Mary), à Paris, à Vienne, à Naples. Il n’y a pas de moments creux et le caractère des personnages évolue au fil du temps.

Fury, Fritz Lang (1936) – 4/5: ce qui commence comme une comédie romantique se transforme en film très violent, impliquant lynchage, désir de vengeance et procès. Joe Wilson est arrêté alors qu’il rejoint sa bien-aimée, et accusé à tort d’un kidnapping. La communauté locale se révolte et veut le lyncher, mettant le feu à la prison. La seconde partie du film montre le procès contre les 22 responsables principaux du lynchage. C’est le premier film américain de Fritz Lang, mais on y retrouve certains éléments des films allemands, les gros plans, le rythme, le procès filmé. Avec Spencer Tracy et Sylvia Sydney, et Franz Waxman pour le score.

Follow the Fleet, Mark Sandrich (1936) – 3/5: un agréable divertissement avec Fred Astaire et Ginger Rogers, avec évidemment de belles scènes dansées. Pour le reste, le film a pas mal de défauts: un scénario un peu alambiqué, Fred Astaire qui joue mal ce rôle de marin censé être très masculin, et puis cette scène dérangeante aujourd’hui où on dit à la brune au look d’institutrice qu’elle ferait mieux de jouer la blonde idiote pour plaire aux hommes.

Camille, George Cukor (1936) – 2/5: une adaptation de La dame au camélias, encore un classique que je ne connaissais pas. L’histoire m’a ennuyée (je sais aussi pourquoi je n’ai jamais lu Alexandre Dumas, il ne m’inspire pas du tout), et je me fatigue de Greta Garbo qui joue quand même souvent de la même manière, même si ce rôle est considéré comme son meilleur.

Le roman d’un tricheur, Sacha Guitry (France, 1936) – 3/5: un film un peu bizarre mais intéressant en fin de compte pour sa liberté de ton et de conception. Il est tourné quasi tout le temps comme un film muet avec une voix off qui raconte ce qui se passe, le générique de début est parlé, présentant tous les acteurs, et il change beaucoup d’endroit, de Monaco à Paris en passant par Biarritz. Un homme (joué par Sacha Guitry lui-même) raconte sa vie, comment elle a complètement changé après un repas de champignons et comment il est de devenu tricheur dans les jeux de cartes au casino – j’ai pensé à The Card Counter.

J’ai tenté de revoir Modern Times de Charlie Chaplin mais j’ai arrêté le film après 5 minutes (en plus le dvd était rayé), je me suis dit que mon visionnage dans les années 1990 ferait l’affaire. Certains classiques sont devenus trop classiques et je n’ai plus envie de les voir si je ne les aime pas plus que ça.

Partie de campagne, Jean Renoir (France, 1936) – 3/5: Jean Renoir a tourné ce film pendant l’été 1936 mais a été interrompu par les conditions météo. Il ne l’a jamais achevé et il est finalement sorti en 1946, ne comptant que 40 minutes. Basé sur une histoire de Guy de Maupassant, il conte l’excursion d’une famille de commerçants parisienne en bord de rivière en plein été 1860, pour un pique-nique. Deux hommes locaux sont de suite intéressés par Henriette et sa mère et leur proposent une promenade en barque. J’ai eu du mal avec la réaction d’Henriette quand dans un premier temps elle refuse les approches du canotier, puis accepte quand même et se laisse aller, mais c’est sans doute une réaction liée à mon époque. A part ça, le film fait clairement penser aux tableaux des peintres de la fin du 19e siècle.

The Prisoner of Shark Island, John Ford (1936) – 2/5: le docteur Samuel Mudd est accusé d’avoir aidé John Wilkes Booth à fuir après avoir assassiné Lincoln. Il est sommairement jugé et envoyé en prison dans une îles aux eaux infestées de requins. Sa femme tente de le libérer mais c’est finalement grâce à sa lutte contre une épidémie de fièvre jaune qu’il pourra rejoindre sa famille. C’est basé sur une histoire vraie, mais le film insiste sur l’innocence de Mudd alors que dans les faits, elle n’a jamais été prouvée. Si John Ford a l’art de filmer, avec des jeux d’ombres et lumières, il perpétue cependant le racisme ambiant de l’époque: les Noirs sont montrés comme de grands enfants qui ont besoin de l’aide paternaliste des Blancs, perpétuant le système de l’esclavage même s’il vient d’être aboli. Et puis, c’est un film avec un procès et des scènes de prison, le genre de choses que je préfère éviter en temps normal.

At the movies – 30 (1930s)

Clark Gable dans Mutiny on the Bounty (domaine public)

The 39 Steps, Alfred Hitchcock (Royaume-Uni, 1935) – 4/5: une histoire d’espionnage, et d’un homme (Robert Donat) qui s’y trouve mêlé par hasard, avec beaucoup d’action et de revirements de situations, et une blonde hitchcockienne (Madeleine Carroll). Filmé dans les rues de Londres mais aussi en Ecosse. J’ai été scotchée du début jusqu’à la fin (même le dénouement est un peu précipité, à une minute de la fin du film – une constante dans les films anciens).

Captain Blood, Michael Curtiz (1935) – 3/5: un film de cape et d’épée, avec des pirates et des batailles navales – tout ce qu’il faut pour ne pas s’ennuyer. Errol Flynn prend le rôle du Capitaine Blood, médecin anglais envoyé comme esclave en Jamaïque. Il devient pirate et capitaine d’un navire. Il avait été acheté par Arabella Bishop, jouée par Olivia de Havilland, et évidemment, ils sont attirés l’un par l’autre. Les deux acteurs sont ici réunis pour la première fois et sont au tout début de leur carrière. Le film mélange scènes d’action (certaines viennent d’un film muet de 1924, The Sea Hawk) et romantisme dégoulinant, le tout appuyé par le score d’Erich Wolfgang Korngold. Certaines scènes sont totalement invraisemblables (Blood attaque deux bateaux, mais commence par celui à sa droite. Celui de gauche attend sagement sans rien faire) et la robe en satin d’Arabella sort de toutes les scènes d’action sans une poussière ou un pli. Ce film m’a beaucoup fait penser à la série Black Sails.

Ruggles of Red Gap, Leo McCarey (1935) – 2/5: Marmaduke Ruggles est le valet et majordome du comte de Burnstead, mais ce dernier le perd au jeu à Paris et il doit rejoindre le couple américain Egbert et Effie Floud qui l’emmènent à Red Gap, dans l’Ouest lointain des Etats-Unis. C’est un film qui met en avant le contraste entre la rigidité toute anglaise et le caractère totalement décomplexé des Américains, avec une bonne dose de patriotisme étatsuniens (Ruggles récite un long discours de Lincoln sur le fait que les hommes sont égaux). Ce n’est pas le film le plus passionnant du monde et il est très cliché. A noter: des vues de Paris, un train, le restaurant chinois est un restaurant de chop suey, une cage à oiseau (on ne voit pas s’il y a un canari dedans).

Top Hat, Mark Sandrich (1935) – 3/5: un autre film du duo Fred Astaire – Ginger Rogers, sur un scénario proche de The Gay Divorcee, basé sur un quiproquo (chose que mon esprit très rationnel a du mal à accepter sur la longue durée). Les morceaux de danse sont superbes (mais il n’y en a pas tant que ça), avec notamment la chanson « Cheek to Cheek », pendant laquelle Rogers porte une robe à plumes d’autruche qui virevoltent (on voit les traces sur le sol). Les décors sont exagérés et clairement en carton-pâte, représentant d’abord un hôtel de luxe à Londres, puis le Lido à Venise, avec son hôtel art déco. Je ne me suis pas ennuyée mais ce genre de film est très cliché, et l’histoire n’est qu’un prétexte pour les morceaux dansés. A noter: un des personnages commande un Horse’s Neck, un cocktail à base de whisky et ginger ale.

Mutiny on the Bounty, Frank Lloyd (1935) – 3/5: un film historique qui prend de grandes libertés avec l’histoire (le capitaine Bligh était sévère mais apparemment pas aussi extrême) mais qui est très divertissant. Charles Laughton (Bligh) ressentait une certaine infériorité par rapport à son physique face à Clark Gable (sans moustache parce que c’était interdit dans la marine anglaise de l’époque), et en effet, le contraste est vraiment énorme. Une des jeunes filles tahitiennes est en fait mexicaine, mais l’autre est hawaïenne – on se rapproche donc. Les scènes de mer sont spectaculaires et le film a en partie été tourné à Tahiti et en Polynésie Française. J’ai hésité à monter ma note à 4 mais le côté cliché des bons et du mauvais est un peu trop énorme – cela reste malgré tout un bon film pour l’époque (apparemment pour la réalité historique, il faut se tourner vers The Bounty de 1984 avec Mel Gibson et Anthony Hopkins).

The Informer, John Ford (1935) – 4/5: a priori un film se passant en Irlande, ça ne m’intéresse pas trop (je ne sais pas trop pourquoi le sujet ne me passionne pas), mais ici, on sent la patte de John Ford (d’origine irlandaise). Le personnage principal, Gypo (Victor McLaglen) est d’une pauvreté extrême. Pour réaliser ses rêves et celui de sa jeune amie, il dénonce son ami recherché pour meurtre à la police anglaise, le tout pour 20£, qu’il dépense ensuite sans compter alors qu’il est en plein déni de ce qu’il a fait. Toute l’action se déroule en quelques heures, la nuit, dans des décors sales et sombres. Il y a de nombreuses références au cinéma muet et aux films de l’expressionnisme allemand (comme M le maudit). Max Steiner a composé une bande-son qui suit l’action au plus près (un exemple type de mickeymousing).

The Devil is a Woman (Joseph von Sternberg, 1935) – 3/5: dernière collaboration entre Josef von Sternberg et Marlene Dietrich, (leur relation était devenue trop compliquée), cette espagnolerie (comme une chinoiserie mais en Espagne) est confuse au niveau de l’histoire. Je n’ai pas aimé le portrait qu’on fait de cette femme manipulatrice et profiteuse alors que les hommes sont montrés comme des victimes (sauf cette détestable scène où un homme bat la femme jouée par Dietrich – hors plan, mais quand même). Par contre, la lumière, le jeu du clair-obscur est magnifique et les plans très travaillés. A noter: les fêtes du Carnaval et les gens masqués, un train, les costumes hispanisants très inventifs (la cape à mini pompons !).

At the movies – 26 (1930s)

Cette série de films, commencée en juin, a été interrompue par l’été chaud et ses longues soirées lecture. Avec l’arrive subite de l’automne, j’ai repris le fil et j’ai bien avancé sur ma liste.

L’Atalante de Jean Vigo

The Count of Monte Christo, Rowland V. Lee (1934) – 2/5: voilà un film qui m’a laissée complètement indifférente, et que j’ai regardé jusqu’au bout juste parce que je ne connaissais pas l’histoire. Je n’ai d’ailleurs pas grand-chose à en dire (pas d’acteurs ni un réalisateur très connus mais Alfred Newman à la musique).

L’Atalante, Jean Vigo (France, 1934) – 4/5: j’ai failli arrêter ce film en cours de route à cause de Michel Simon (Père Jules) que je déteste (dans le genre grotesque et qui surjoue, il gagne le premier prix) mais je me suis attachée aux autres personnages, à ce capitaine de péniche et sa jeune épouse qui découvre Paris toute seule (son mari lui avait promis une visite mais il est empêché parce que le Père Jules est parti se saouler, et du coup, elle part seule, sauf que le mari ne l’attend pas et repart avec la péniche – sympa, le mari, n’est-ce pas ?). Il y a tellement de poésie dans ce film, et puis tant de modernité en comparaison au cinéma américain. Déjà, ça se passe en grande partie en extérieur et il n’y a aucun souci à faire dormir dans le même (petit) lit un couple enlacé. Il y a aussi une scène très érotique, juste par les expressions du visage. Le second et dernier film de Jean Vigo. A noter: une colonie de chats qui vit sur la péniche.

The Scarlet Empress, Josef von Sternberg (1934) – 3/5: l’histoire de Catherine II de Russie, jouée par Marlene Dietrich et filmée par Josef von Sternberg et avec de très nombreuses libertés par rapport à la réalité historique. Je dirais même que c’est du grand n’importe quoi avec des décors remplis de statues paganistes et d’icônes religieuses très naïves, des robes à froufrous et des coiffures à bouclettes. J’ai préféré de loin le minimalisme de Queen Christina. On voit la marque de von Sternberg et ses éclairages très travaillés mais je préfère des thèmes plus modernes qui conviennent d’ailleurs mieux à Dietrich.

Judge Priest, John Ford (1934) – 1/5: une comédie par John Ford, racontant l’histoire d’un juge dans l’état sudiste du Kentucky. Son meilleur ami est un Noir, dont le personnage est censé être comique. J’ai eu du mal… J’ai aussi eu du mal quand le neveu du juge, Rome, tente de courtiser sa voisine, ne lui laissant aucune échappatoire, la bloquant physiquement avec ses bras. La seule actrice que j’ai reconnue est Hattie McDaniel, qu’on retrouvera dans Gone With the Wind. C’est un film qui a mal vieilli et qui est bien loin des westerns du réalisateur.

The Gay Divorcee, Mark Sandrich (1934) – 3/5: une des premières collaborations entre Fred Astaire et Ginger Rogers, sur fond d’une histoire de divorce pleine de quiproquos. Les scènes de danse sont très réussies, le tout dans un décor évoquant un hôtel art déco d’une cité balnéaire anglaise. A noter: la cage avec les canaris.

The Merry Widow, Ernst Lubitsch (1934) – 2/5: Maurice Chevalier et Jeanette MacDonald jouent les deux protagonistes de ce film adapté d’une opérette. Chansons et danses se succèdent, entrecoupées de scènes de dialogue. Est-ce que je me suis ennuyée ? ça va encore. Est-ce que j’ai trouvé ça intéressant ? non. J’ai eu une impression de déjà vu et rien ne m’a aidée à m’attacher au film et aux acteurs (même pas les robes créés par Adrian – sans doute parce que ça se passe en 1885 et non dans les années 1930).

It’s a Gift, Norman Z. McLeod (1934) – 2/5: une comédie – heureusement fort courte – qui met en avant l’acteur du muet W.C. Field dans une série de gags (repris en partie des films muets, d’après wikipédia). Le film raconte l’histoire d’un épicier maladroit et de son épouse désagréable, ainsi que de leurs deux enfants, puis leur départ en Californie pour exploiter une plantation d’orangers. Je n’ai pas vraiment ri, à peine souri, mais je suis un public très difficile pour les comédies. A noter: le rôle de Baby LeRoy, un des enfants acteurs mis en avant par les studios, qui a eu une très courte carrière (et sérieusement, ce rôle, c’est du grand n’importe quoi et ça n’apporte rien à l’histoire).

At the movies – 21 (1930s)

The Bitter Tea of General Yen de Frank Capra

I’m No Angel, Wesley Ruggles (1933) – 3/5: un film avec Mae West (qui a écrit le scénario) et Cary Grant. Tira est danseuse burlesque dans un cirque et séduit tous les hommes. Elle noue des relations plus intimes avec ceux qui ont de l’argent. Au fil de l’histoire, plusieurs homme se succèdent jusqu’à ce qu’elle rencontre Jack (Cary Grant, donc). Une classique histoire de femme pauvre qui recherche l’homme riche pour subvenir à ses besoins (on nommait ça une « gold digger »). Mae West brille par son langage très cru et ses formes aguichantes, mais j’avoue ne pas trop accrocher – ça devient vite vulgaire. A noter: la robe avec toile d’araignée en strass, le morceau de burlesque mais sans effeuillage, les lions du studio.

Little Women, George, Cukor (1933) – 1/5: dieu que c’est neuneu (et tant pis si le mot n’existe pas) ! C’est clairement lié à l’histoire de base, venant du roman de Louisa May Alcott, et si la version de Greta Gerwig de 2019 avait quand même côté rafraîchissant, celle-ci est juste ennuyeuse et pleine de bons sentiments, même si elle avait reçu de très bonnes critiques à l’époque. Avec Katharine Hepburn et Joan Bennett. A noter: des chatons et une cage avec des canaris, la musique romantico-larmoyante de Max Steiner.

Morning Glory, Lowell Sherman (1933) – 2/5: encore un film avec Katharine Hepburn, que je n’aime pas trop en fait (en tous cas dans ses premiers rôles), face à Douglas Fairbanks Jr. C’est l’histoire d’une jeune actrice qui veut percer dans le monde du théâtre et qui tente d’obtenir son premier rôle. Une fois que c’est acquis, elle se rend compte qu’elle doit choisir entre le succès et l’amour (oui, c’est toute l’histoire, et désolée pour le spoil). C’est un film très statique, avec très peu de décors (c’est adapté d’une pièce de théâtre) et j’ai perdu le fil à plusieurs moment pour cause d’ennui.

She Done Him Wrong, Lowell Sherman (1933) – 3/5: encore un hasard, deux films de Lowell Sherman à la suite, ici avec Mae West et Cary Grant (et tourné avant I’m No Angel). Je dois dire que j’ai préféré Mae West dans ce film-ci, même si elle a un style particulier. L’histoire, un peu compliquée, se passe essentiellement dans un saloon pendant les années 1890; Lou y est la chanteuse principale et a l’art de s’entourer d’amis qui la couvrent de diamants. Cary Grant joue le rôle du capitaine de police Cummings qui fait une enquête undercover pour démasquer un réseau de prostitution et d’autres activités illégales (c’est parfois un peu confus, je trouve). Plaisant, mais sans plus. A noter: comme dans I’m No Angel, Mae West a une domestique afro-américaine – c’était un souhait de la star de mettre en avant des actrices noires.

The Bitter Tea of General Yen, Frank Capra (1933) – 4/5: Megan (Barbara Stanwyck) arrive à Shanghai en plein milieu de la guerre civile pour épouser un missionnaire. Elle se trouve mêlée à une émeute et est sauvé par le Général Yen (Nils Asther), un des rebelles. Celui-ci tombe amoureux d’elle… Il y a évidemment plein à redire au niveau du racisme ambiant de l’époque: les Blancs qui dominent, qui nomment les Chinois des « chinamen » sans distinction, les vêtements et les décors un peu exagérés, le fait d’avoir engagé un acteur suédois pour jouer un Chinois, son maquillage risible avec les sourcils pointés… Mais l’histoire se tient et est assez prenante, analysant l’attirance progressive de Megan pour la culture chinoise et pour le Général. Et l’utilisation du noir, du blanc et des jeux d’ombres et lumières est particulièrement travaillé et fait penser à du Josef von Sternberg. Une belle surprise donc pour cette « chinoiserie ». A noter: plusieurs scènes avec un train et l’actrice japonaise Toshia Mori.

Ceci termine ma liste d’une bonne vingtaine de films pour 1933. Comme les années précédentes, j’ai laissé tombé les Marx Brothers et Laurel et Hardy et je n’ai pas trouvé State Fair de Henry King. 1934 est l’année de l’introduction du code Hays qui régit la moralité des films à partir du début de l’été, et donc je vais les regarder en deux fois, en fonction de leur date de sortie (avant/après juillet). En fait, je suis même leur ordre chronologique de sortie que j’ai trouvé sur wikipedia. J’en ai 21 sur ma liste.

The Lost Patrol, John Ford (1934) – 2/5: pendant la Première Guerre mondiale, une patrouille se perd dans le désert de Mésopotamie. Elle se réfugie dans une oasis mais ne peut la quitter, harcelée par les Arabes. Au fur et à mesure de l’histoire, les soldats sont tués et les émotions s’exacerbent. Je n’ai pas trouvé ça très passionnant, il n’y a que des hommes (qui parlent des femmes comme objets de plaisir), mais c’est un film en extérieur, et on voit l’art de la composition et des jeux de lumières de John Ford (dont j’ai vu beaucoup de westerns). Avec Victor McLaglen et Boris Karloff.

It Happened One Night, Frank Capra (1934) – 3/5: une comédie romantique mettant en scène Claudette Colbert dans le rôle d’une jeune femme fuyant son père très riche et qui est opposé à son mariage avec un pilote d’avion et Clark Gable (avec moustache, mais sans poils sur le torse), un journaliste au chômage, qui la mène à bon port en échange d’un scoop. Une histoire classique de rejet qui se transforme en amour – et du coup ce n’est pas toujours très passionnant, mais ce n’est pas un mauvais film non plus.

At the movies – VII (1930s)

Arrowsmith (via IMDB)

À nous la liberté, René Clair (France, 1931) – 3/5: au début du film j’ai été très sceptique et puis je me suis laissée entraîner – pas à cause de l’histoire, ni à cause du fait que c’est encore très muet, ce qui rend le film bien moins pétillant quel films américains de l’époque, mais à cause des décors modernistes / futuristes de Lazare Meerson, montrant une architecture aux lignes de fuite assez intéressantes. C’est à nouveau un film très musical, avec une composition de Georges Auric – là par contre, on est en avance par rapport aux Etats-Unis où les scores sont encore peu courants en 1931. Le film fait penser par son sujet à celui de Charlie Chaplin, Modern Times.

Arrowsmith, John Ford (1931) – 2/5: quand John Ford a tourné ce film, il en avait déjà réalisé une septantaine auparavant, mais les meilleurs restaient à venir (encore une septantaine). Celui-ci a gagné l’Oscar du meilleur film alors que franchement, c’est du grand n’importe quoi. L’acteur principal, Ronald Colman, était une star à l’époque et remplissait les salles, alors qu’il a complètement été oublié aujourd’hui. L’histoire, basée sur un livre, part dans tous les sens – en gros ça parle d’un médecin qui découvre un sérum pour soigner la peste (mais avant ça, il épouse une infirmière et commence une carrière comme médecin de campagne dans le Dakota du Sud). Plusieurs choses à noter: les superbes buildings art déco de New York et les décors dans le même esprit, le médecin antillais noir qui est considéré comme un égal (fait rare à cette époque où les Noirs étaient dénigrés et moqués), des images de plus en plus belles vers la fin, jouant avec les ombres. Et puis aussi, en complément à ce que je disais plus haut: Alfred Newman, le grand compositeur de musiques de film, est ici crédité mais il n’y a de la musique qu’au générique et lors d’une scène vers la fin.

Bad Girl, Frank Borzage (1931) – 2/5: une comédie dramatique vite oubliée mettant en scène une jeune femme et un jeune homme de milieu modeste, vivant à New York (les acteurs Sally Eilers et James Dunn étaient inconnus à l’époque – et sont tombés dans l’oubli depuis). Ils tombent amoureux à Coney Island (jolies scènes des montagnes russes – une des seules scènes en extérieur) et passent du temps ensemble, mais du coup sont forcés de se marier (on ne rentre pas à 4h du matin à cette époque sans qu’il se soit passé des choses – mais c’est hors écran). Leur manque de communication provoque une série de quiproquos malheureux mais tout s’arrange à la fin. A noter: un très courte scène avec une cage à oiseau que l’héroïne recouvre d’un tissu, une « bad » girl qui ne l’est pas vraiment.

Kameradschaft, Georg Wilhelm Pabst (France-Allemagne, 1931) – 4/5: quand j’ai vu que ce film parlait de mineurs, je me suis dit « oh non, ça risque d’être ennuyeux » (des mauvais souvenirs de Germinal, je crois). Et puis en fait, c’est passionnant. C’est un film catastrophe, et l’explosion dans la mine est très bien reconstituée (ça a été fait en studio), mais c’est surtout un film sur l’amitié profonde qui existe entre mineurs, peu importe si la frontière de deux pays les sépare (la fin est amère par contre). Le film est tourné en extérieur (sauf les scènes sous terre) et ça fait du bien d’avoir un horizon, de l’air… Si les films américains de l’époque sont intéressants pour les histoires qu’ils racontent, ils restent enfermés dans les studios et les scènes d’extérieur me manquent beaucoup. A noter qu’il n’y a pas de musique dans le film (à part la scène du bal musette), juste les nombreux bruitages dans la mine mais aussi à l’extérieur. Il y a aussi de belles scènes avec un train.

Le million, René Clair (France, 1931) – 2/5: à vrai dire, ce film précède À nous la liberté (je ferai plus attention à ça dans le futur). Dans cette comédie musicale, les héros partent à la poursuite d’une vieille veste dans laquelle se trouve un billet de loterie gagnant. Il y a donc pas mal de quiproquos et de burlesque, et c’est très virevoltant. Si le film a ses qualités, je n’accroche pas du tout à ce type d’histoire et j’ai même accéléré un peu pendant certains chants d’opéra un peu longs et qui n’apportent pas grand-chose à l’histoire.

The Front Page, Lewis Milestone (1931) – 2/5: mais quel film bavard ! ça se passe dans la salle de presse d’un tribunal, les différents correspondants des journaux attendent des nouvelles du prisonnier qui sera exécuté le lendemain. Parmi ceux-ci, il y a Hildy Johnson qui compte quitter son job le soir même pour rejoindre sa fiancée, mais de nouveaux événements l’en empêchent à chaque fois, comme l’évasion du prisonnier. On ne quitte donc quasi jamais la salle de presse, ce qui rend le film étouffant. On tend vers les « screwball comedies » des années qui viennent, mais sans trop insister sur l’élément féminin dans ce cas-ci. Il y a quelques plans intéressants, mais en gros, je me suis ennuyée.

The Champ (King Vidor, 1931) – 3/5: Dink, un gamin, vit avec son père, The Champ, ancien champion de boxe à Tijuana au Mexique. Champ est tombé dans l’alcoolisme et le jeu, et c’est le jeune garçon qui s’occupe de lui quand il est saoul. Il y a évidement plein de hauts et de bas, et ça se termine tragiquement. Si certains éléments de ce film m’ont dérangée, comme le jeu forcé de l’enfant (un problème récurrent) et le drame un peu trop exacerbé, d’autres m’ont agréablement surprise, comme le fait qu’une grande partie du film a été tourné en extérieur. A noter: un train, vu de l’extérieur et de l’intérieur, l’architecture de style espagnol de Tijuana.

Ceci termine ma liste de films de 1931. J’en ai abandonné deux, Monkey Business, de Norman McLeod avec les Marx Brothers (le burlesque ne passe vraiment pas chez moi), et Tabu, de Robert J. Flaherty et F.W Murnau (parce que c’est muet et j’ai un vague souvenir de l’avoir déjà vu). Il y a en trois de ma liste que je n’ai pas trouvé: Strangers May Kiss de George Fitzmaurice, The Sin of Madelon Claudet d’Edgar Selwyn et The Smiling Lieutenant d’Ernst Lubitsch.