At the movies – 41 (1930s)

The Hurricane, John Ford

You Only Live Once, Fritz Lang (1937) – 3/5: considéré comme un précurseur du film noir, ce second film de Fritz Lang tourné aux Etats-Unis conte l’histoire très sombre d’Eddie Taylor (Henry Fonda) qui sort de prison et qui souhaite vivre sa vie avec sa nouvelle épouse, Joan (Sylvia Sidney) mais qui est accusé d’un nouveau délit, remis en prison et condamné à la peine de mort. Le film semble un peu trop compact et en effet, 15 minutes ont été censurées parce qu’elles ont été considérées trop violentes. Il y a un côté Bonnie & Clyde par moments, surtout vers la fin. Je n’ai pas trop aimé Henry Fonda, le trouvant un peu inconsistant et trop extrême à la fois. Le jeu des ombres et lumières est à nouveau superbe. A noter: un chat, des trains.

Stage Door, Gregory La Cava (1937) – 3/5: une bande de filles habite dans une pension, toutes sont aspirantes actrices ou danseuses de music-hall. Il y a de nombreuses rivalités, évidemment, le succès pour l’une, le suicide pour une autre, et surtout des dialogues dont le rythme est tellement soutenu qu’il faudrait faire pause pour lire les sous-titres, ou rewind pour les écouter une seconde fois. Avec Katharine Hepburn et Ginger Rogers, et plein de seconds rôles. A noter: un chat qui sert d’écharpe à sa propriétaire.

Un carnet de bal, Julien Duvivier (France, 1937) – 4/5: Christine (Marie Bell) vient de perdre son mari et ne sait plus trop quoi faire de sa vie. Elle retrouve son carnet de bal d’il y a 20 ans et part à la recherche de ses prétendants de l’époque. C’est un film à épisodes qui montre une belle palette d’hommes différents et qui fait un portrait de la société de l’époque. Il y a une grande nostalgie, et surtout le constat que Christine ne s’en est pas si mal sortie. A noter: les danseuses de cabaret au seins nus, la musique du Rico’s Creole Band, et toute une palette d’acteurs, de Raimu à Fernandel.

Dead End, William Wyler (1937) – 4/5: à New York, là où se rencontrent immeubles de luxe et logements misérables, divers personnages vivent leur vie. Même si Sylvia Sidney et Joel McCrea sont en tête d’affiche, il y a aussi un grande place pour Humphrey Bogart et surtout pour les « Dead End Kids », un groupe de jeunes garçons adolescents. C’est intéressant de voir la place qui leur a été donnée, à une époque où les ados ne jouent pas dans les films (ou alors dans le rôles d’enfants). L’histoire est plutôt limitée mais le film reste rythmé avec tous ces personnages différents. Même s’il s’agit d’une adaptation d’une pièce de théâtre, et que donc le lieu de tournage est unique, la beauté des images compense cela, avec de beaux jeux d’ombres et lumières.

Shall We Dance, Mark Sandrich (1937) – 3/5: encore une rom com avec Fred Astaire et Ginger Rogers, au scénario plus que bancal. Mais il y a des scènes vraiment intéressantes comme la promenade des chiens sur le paquebot, la scène dans la salle des machines, ou encore les claquettes en patins à roulettes dans le parc newyorkais (celle-là, tout particulièrement). Par contre je n’ai pas aimé le numéro final. Tous les décors sont en style art déco, avec même des raccords entre le paquebot et la chambre d’hôtel. Avec une musique de George et Ira Gershwin.

A Star is Born, William A. Wellman (1937) – 3/5: Esther (Janet Gaynor) quitte son Dakota natal pour devenir une star à Hollywood. Les débuts sont difficiles, elle n’est pas la seule aspirante actrice, et puis elle rencontre la star Norman Maine (Fredric March) qui est plus souvent ivre que sobre, ce qui nuit à sa carrière. Il s’éprend d’elle et la présente au patron d’un studio (Adolphe Menjou) qui en fait une grande actrice. Esther, devenue Vicki Lester, épouse Norman, et tente de l’aider mais c’est compliqué. Un film d’Hollywood qui ne cache pas comment fonctionne le système hollywoodien de fabrication des stars (mais sans aucune allusion à la dimension sexuelle). Un film qui montre comment une femme nie sa personnalité pour sauver un homme irrécupérable. Pas mal mais sans plus – l’histoire est un peu trop facile (il y aura trois remakes dans le futur).

The Hurricane, John Ford (1937) – 3/5: ce film aurait mérité un 4/5 mais ce n’est pas possible pour diverses raisons. L’histoire se passe sur une île perdue des mers du sud et implique des Français, avec parmi eux l’horrible gouverneur (Raymond Massey) et son épouse (Mary Astor) et le (bon) prêtre (C. Aubrey Smith) ainsi que des locaux, Teranga (Jon Hall) qui est amoureux de Marama (Dorothy Lamour). Teranga est injustement arrêté et mis en prison mais il cherche constamment à s’évader, ce qui alourdit sa peine. Toute la première heure est consacrée à cette « mise en place », avec un bonne dose d’exotisme et de bons sauvages. La dernière partie est consacrée à l’ouragan qui sème la destruction sur l’île. Ces scènes sont assez incroyables, réalisées avec les effets spéciaux de l’époque. Le problème du film, ce sont les acteurs blancs qui jouent des rôles de Polynésiens, l’omniprésence de la religion et des bons sentiments, et les mauvais dont le caractère est vraiment forcé (ils sont vraiment angoissants par moments).

Dangerous Men

Mick LaSalle, Dangerous Men: Pre-Code Hollywood and the Birth of Modern Man: il était évident pour moi, qu’après avoir lu Complicated Women, il fallait que je lise son pendant masculin. Dans ce livre, le critique américain Mick LaSalle fait le portrait des acteurs américains qui ont dominé le cinéma d’Hollywood entre 1929 et 1934, des débuts du cinéma parlant à l’instauration du Code Hays qui a limité fortement ce qui pouvait être montré dans les films. Je trouve que le livre est un peu moins bien construit que celui sur les femmes, mais il y a quand même une belle palette d’hommes, souvent spécialisés dans un type de rôle: les monstres pour Boris Karloff et Bela Lugosi, les gangsters pour James Cagney et Edward G. Robinson, les latin lovers pour Ramon Navarro, les militaires, les avocats, les hommes un peu louches… C’est l’époque de Clark Gable qui enflamme les coeurs des jeunes filles (avec ou sans moustache), mais aussi de Gary Cooper ou Maurice Chevalier. Tous ces hommes sont engagés pour l’un ou l’autre studio, et jouent des rôles en fonction des caractéristiques de ceux-ci. Ils sont dans l’air du temps et sont « modernes » dans le sens où le cinéma de l’époque a abandonné le conservatisme d’antan et ose décrire la vie telle qu’elle est, n’hésitant pas à montrer de la violence ou une sexualité exacerbée (dans les limites de l’époque évidemment – les corps dénudés, c’est pour bien plus tard).

J’aime toujours autant le ton de Mick LaSalle; j’ai dévoré trois de ses livres en quelques mois. A vrai dire, il ne m’en reste qu’un seul à lire, mais j’hésite à cause de son sujet: ce que Hollywood peut apprendre des actrices françaises contemporaines. En même temps, ça pourrait être intéressant (edit: je l’ai commencé). En attendant, je continue à regarder les films des années 1930 avec tous ces acteurs et actrices et je m’amuse beaucoup.

Complicated women

Mick LaSalle, Complicated women: sex and power in Pre-Code Hollywood: après avoir lu Dream State, je me suis penchée sur la bibliographie de l’auteur et je suis tombée sur ce livre qui me tentait énormément vu que je suis en train de regarder tous ces films des années 1930. Il parle des actrices qui ont dominé les écrans pendant les quelques années du cinéma parlant allant de 1929 à 1934, date où est instauré le « Code », une liste de recommandations très conservatrices qui ont fortement limité ce qu’on pouvait montrer à l’écran (plus de baisers, les couples dorment dans les lits jumeaux, le mal est toujours puni, etc.). Pendant ces cinq années, les actrices étaient très libres dans leur jeu et dans leurs rôles. On voit des prostituées, des femmes qui trompent leur mari, des femmes libres et qui se sentent bien. Greta Garbo et Marlene Dietrich crèvent l’écran, mais aussi Norma Shearer, aujourd’hui oubliée alors qu’elle jouait des rôles assez subversifs.

Mick LaSalle connaît très bien son sujet et nous emmène dans cette époque avec beaucoup de détails et d’humour. C’est un livre passionnant qui permet de découvrir une époque oubliée, où les femmes avaient pas mal de chose à dire et à revendiquer, avant d’être reléguées à des rôles de saintes sans relief ou de damnées qui doivent être punies. Il y a un pendant qui parle des hommes de la même époque, que j’ai évidemment commencé. Du coup, j’ai envie de voir tous ces films, mais ils sont parfois un peu difficiles à trouver.

Stories I only tell my friends

Rob Lowe, Stories I only tell my friends: c’est via l’autobiographie d’Andrew McCarthy et sa présentation sur goodreads que je suis tombée sur celle de Rob Lowe, déjà plus ancienne, publiée en 2011. Je ne pouvais pas passer à côté: les critiques étaient plutôt positives et c’était mon acteur préféré dans les années 1980. Ma copine aimait Tom Cruise, moi c’était Rob Lowe, et donc on allait voir tous leurs films ensemble (et on fantasmait beaucoup !).

Le schéma du livre est à nouveau assez classique, plutôt linéaire, à part un premier chapitre introductif se passant à un autre moment. Enfance dans l’Ohio, puis des parents qui se séparent et un déménagement à Malibu, en Californie, à une époque où ce coin de Los Angeles n’avait pas encore vraiment la cote. Rob Lowe était passionné par le théâtre mais trouve peu d’opportunités à LA, ce qui ne l’empêche pas d’être décidé: il veut faire carrière dans le cinéma et il fait de nombreuses auditions. Son premier rôle, c’est toute une saga: il joue en effet Sodapop dans The Outsiders de Francis Ford Coppola, avec une brochette de jeunes acteurs (Tom Cruise, Matt Dillon…). Lowe raconte la longue série d’auditions, le tournage, un montage qui réduit son rôle à pas grand-chose, le film qui n’a que peu de succès – cette partie a été passionnante pour moi – j’adorais ce film (je l’ai revu, du coup, en version director’s cut – et j’ai toujours aimé, mais pas de manière aussi inconditionnelle qu’avant).

Lowe décrit ensuite les films suivants, la création du « Brat Pack » – il est intéressant de lire que sa version n’est pas la même que celle d’Andrew McCarthy -, les rôles de beau mec mais dans des films pas super réussis, ses choix de plus en plus désastreux et ses addictions (lui aussi). Il parle aussi de son retrait calculé d’Hollywood, s’installant à Santa Barbara avec son épouse, puis de cette opportunité de jouer dans The West Wing, ce qui relance sa carrière.

Tout comme avec l’autobiographie d’Andrew McCarthy, j’ai adoré cette plongée dans le monde des jeunes acteurs d’Hollywood dans les années 1980, mes idoles de l’époque. Et Rob Lowe a écrit un livre passionnant, dont j’ai tourné page après page avec plaisir, apprenant à mieux connaître un homme avec ses doutes et ses passions.

La fiancée du dieu-rat

Barbara Hambly, La fiancée du dieu Rat: après Si loin de vous, je ne voulais pas quitter l’ambiance du Hollywood des années 20, ce qui tombait bien vu que j’avais encore deux romans sur le même thème dans ma PAL. Mon choix s’est porté en premier sur celui de Barbara Hambly. Nous suivons la star du muet Chrysandra Flamande et ses trois chiens pékinois dans les fêtes et les tournages de films à Hollywood et dans la campagne environnante. Mais un jour, un acteur est retrouvé assassiné. Un vieux Chinois la prévient qu’une malédiction est tombée sur elle parce qu’elle a porté un bijou très ancien qui la désignait comme la fiancée du dieu Rat. Avec l’aide de sa femme de chambre (qui raconte le récit) et d’amis, elle essaiera d’échapper à cette malédiction. Malgré quelques longueurs, l’histoire donne une bonne idée du milieu de cinéma muet, des conditions de travail, du début de l’ère des stars, d’un L.A. encore couvert de vergers et de puits de pétrole. Un roman agréable, pas compliqué qui fait une bonne lecture de vacances (si on oublie le fait que le texte de l’édition en Livre de Poche a été scanné et que la reconnaissance des caractères a provoqué de trop nombreuses coquilles qui rendent la lecture parfois un peu aléatoire).

Si loin de vous

Nina Revoyr, Si loin de vous: un très beau roman en demi-teintes. 1964. Le héros, un japonais vieillissant, est contacté par un jeune journaliste pour parler de sa carrière de star du film muet. Mais pour Jun Nakayama il n’est pas simple de repenser au passé, celui-ci ayant été marqué par des événements assez graves qui ont mis fin à sa carrière. Au fil des pages, ce passé ce dévoile, avec de nombreuses descriptions du Hollywood d’époque, ses fêtes, son industrie naissante, le racisme latent par rapport aux étrangers, les relations humaines… Pour écrire ce roman, l’auteur s’est inspirée en grande partie de la carrière de Sessue Hayakawa, un des acteurs japonais les plus importants de l’époque. Ce que j’ai aimé dans ce livre, c’est la reconstitution d’une période, la mise en parallèle avec le Los Angeles des années 60, les pensées d’un homme très réservé qui autant d’années plus tard ne veut pas que la vérité se révèle au grand public, le côté polar, sans l’être vraiment. Bref, un livre qui est longtemps resté sur ma PAL mais que je conseille.

Ciro’s special

En complément du billet sur Xavier Cugat et Bathing Beauty, voici un des cocktails que buvait la star dans le Ciro’s Nightclub, à Hollywood dans les années 40. (des photos ici)

Au goût, c’est délicieux… les saveurs se développant l’une après l’autre.

– le jus d’un citron vert

– 3 cl de crème de cassis

– 1 cl de Grand Marnier

– 6 cl de rhum brun Jamaïcain, remplacé par du Havana Club ambré

Passez au shaker avec des glaçons et servez dans un verre à martini. Le résultat est d’un rose profond, bien moins rouge que sur la photo.

(recette trouvée dans Beachbum Berry’s Grog Log)