At the movies – 46 (1930s)

Betty Davies dans Jezebel de William Wyler

La bête humaine (Jean Renoir, France, 1938) – 3/5: une adaptation du roman d’Emile Zola mais déplacé aux années 1930, avec comme personnages principaux, les trains à vapeur, dans tout leur gigantisme, sur la ligne Paris Saint-Lazare – Le Havre. Avec Jean Gabin en conducteur du train atteint d’une folie homicidaire dès qu’il est amoureux d’une femme et Simone Simon dont le personnage a été violentée dans le passé. L’histoire est très sombre et brutale, et j’ai eu du mal avec la violence gratuite envers les femmes mais on retrouve ce côté film noir de Quai des Brumes.

Holiday (George Cukor, 1938) – 3/5: le retour du duo Cary Grant – Katharine Hepburn, avec des moments très drôles dans le comportement des deux personnages. Johnny (Grant) est tombé amoureux de Julia Seton (Doris Nolan) pendant les vacances et découvre que celle-ci vient d’une des plus riches familles de New York. Il rencontre par la même occasion sa soeur Linda (Hepburn). Johnny est épris de liberté mais Julia ne l’entend pas de cette manière, alors que Linda comprend bien mieux la situation. C’est un film plaisant mais à la longue, je n’en peux plus de ces adaptations de Broadway qui restent parquées dans les mêmes décors, à l’intérieur (et en général chez des gens très riches).

Three Comrades (Frank Borzage, 1938) – 3/5: adapté d’un roman d’Erich Maria Remarque, et au scénario écrit par F. Scott Fitzgerald et Edward E. Paramore Jr., ce film conte l’histoire d’amitié entre trois hommes (Robert Taylor, Franchot Tone et Robert Young) qui ont combattu ensemble lors de la Première Guerre mondiale et l’amour d’un d’entre eux pour Patricia (Margaret Sullavan), atteinte de tuberculose, le tout sur le fond d’une Allemagne troublée par des émeutes. J’ai beaucoup aimé la sensibilité des dialogues et le fait que le film soit ancré dans l’histoire du moment.

La femme du boulanger (Marcel Pagnol, France, 1938) – 2/5: tout le monde considère ceci comme un bon film, pas moi. Dans un village de Provence arrive un nouveau boulanger (Raimu) et sa jeune et jolie femme, Aurélie (Ginette Leclerc). Celle-ci s’enfuit avec un berger et son mari se voile d’abord la face, puis accepte l’aide de tout le village pour la retrouver (aide un peu hypocrite parce que les habitants veulent juste pouvoir manger du bon pain, ce que le boulanger ne veut plus produire tant qu’il n’a pas retrouvé sa femme). Les rôles des femmes sont quasi inexistants, ou alors tellement cliché entre l’épouse adultère qui ne dit rien et les puritaines du villages. Les hommes représentent aussi des personnages assez typés: l’aristocrate, le curé, le maître d’école. Le temps m’a semblé long, ça cabotine énormément, et une des dernières scènes est particulièrement misogyne. Je suis du côté de l’épouse: j’aurais aussi quitté ce mari un peu idiot et simplet, je me demande d’ailleurs pourquoi elle l’a épousé en premier lieu, mais tout ça n’est pas raconté vu que seul le point de vue de l’homme compte dans ce film.

A Slight Case of Murder (Lloyd Bacon, 1938) – 3/5: une comédie avec des gangsters. Remy Marko (Edward G. Robinson) est devenu riche en vendant de l’alcool durant la Prohibition, mais depuis la fin de celle-ci, ses affaires ont périclité. Au bord de la faillite, il part avec son épouse et sa fille, et un gamin de l’orphelinat ainsi que sa clique d’acolytes, dans sa maison de vacances… où se trouvent les cadavres de quatre gangsters, et un cinquième qui tente de récupérer un butin. Tout tourne au quiproquo, évidemment, et le rythme est assez insoutenable, surtout dans la dernière demi-heure où on se demande s’il reste assez de temps pour éclaircir l’affaire. D’ailleurs la fin est très abrupte. C’était plaisant comme film.

Jezebel (William Wyler, 1938) – 3/5: La Nouvelle-Orléans, 1852. Julie (Betty Davies) est fiancée à Preston (Henry Fonda), un banquier. Mais Julie a un caractère bien trempé et joue la provocation, ce qui fait fuir Preston. Un an plus tard, celui-ci est marié à une nordiste quand il revient pour une visite dans le sud. A ce moment éclate une épidémie de fièvre jaune et Preston sera atteint. La fin du film n’est absolument pas crédible avec Julie qui décide de se sacrifier pour soigner Preston. A part ça, le film est pas mal; c’est surtout Betty Davies qui crève l’écran (alors que j’ai détesté Henry Fonda). A noter: les plantations, la musique de Max Steiner, la similitude avec Gone with the Wind qui sortira un an plus tard (mais sans la guerre de Sécession).

The Lady Vanishes (Alfred Hitchcock, Royaume-Uni, 1938) – 3/5: une avalanche a bloqué un train, dans un pays imaginaire d’Europe Centrale, et les passagers se retrouvent dans un hôtel local qui a du mal a loger tout le monde. C’est là qu’on rencontre ces deux Anglais fans de cricket – Charters et Caldicott – qui vont partager un minuscule lit dans une chambre de bonne. Mais ce ne sont pas eux les héros du film: il s’agit d’Iris (Margaret Lockwood), jeune femme qui doit retourner à Londres pour épouser son amoureux, de Miss Froy, (Dame May Whitty) d’âge moyen et habillée en tweed, de Gilbert (Michael Redgrave) qui étudie les traditions musicales locales (et qui est assez détestable au début du film), ainsi que d’autres personnages hauts en couleur. Hitchcock prend son temps pour présenter les personnages – plus d’une demi-heure – avant que l’histoire ne commence vraiment dans le train. Miss Froy disparaît et Iris a du mal à convaincre les autres passagers qui la prennent pour une folle. Mais Gilbert vient à la rescousse et mène l’enquête. Ce film qui avait commencé pépère se termine en une sacrée histoire de disparition et d’espionnage, le tout dans un train en mouvement, et avec pas mal d’éléments comiques (surtout au début).

Ceci termine ma liste de films de 1938, avec comme favoris Alexandre Nevski pour la composition des images et Quai des brumes pour les ambiances. Beaucoup de films sont bien, mais sans plus et je commence à me lasser de ces films américains tournés à l’intérieur dans juste trois décors différents. La liste pour 1939 est plutôt longue, avec une série de films que j’ai déjà vus dans le passé mais que j’ai envie de revoir et quelques trous dans ma culture comme The Wizard of Oz.

At the movies – 45 (1930s)

Cary Grant, Baby et Katherine Hepburn

Angels with Dirty Faces (Michael Curtiz, 1938) – 3/5: Rocky Sullivan (James Cagney) est un gangster. Il a grandi dans le quartier de Hell’s Kitchen à New York et est resté ami avec Jerry Connolly (Pat O’Brien) qui est devenu prêtre. Si le premier continue ses louches activités, le second tente de le ramener sur le droit chemin, ou du moins il essaie de diminuer son influence sur les jeunes qui sont attirés par le personnage du gangster. C’est un bon film de gangsters, avec aussi Humphrey Bogart en second rôle, mais je coince sur James Cagney et sur les Dead End Kids qui jouent les ados influençables (ils surjouent beaucoup trop).

Bringing up Baby (Howard Hawks, 1938) – 3/5: considéré comme la meilleure screwball comedy du moment, ce film présente Cary Grant et Katharine Hepburn dans un déferlement de dialogues et de quiproquos, avec comme personnages secondaires un léopard (Baby) et le chien George (le célèbre Skippy) qui a volé le si précieux os de brontosaure de Cary Grant (qui est paléontologue dans le film). C’était trop chaotique pour moi, j’ai préféré d’autres screwball comedies comme The Awful Truth ou Nothing Sacred, mais il est évident qu’il y a une alchimie entre les deux acteurs. Et puis voir Cary Grant en peignoir vaporeux de femme, ça n’a pas de prix (avec une mention de « gay »).

Four Daughters (Michael Curtiz, 1938) – 1/5: quatre sœurs musiciennes vivent avec leur père et leur tante Etta. Elles cherchent toutes un mari. J’ai arrêté après une demi heure pour cause de niaiserie, mais apparemment, d’après le résumé, l’histoire tourne au tragique (enfin au gentil tragique où tout finit bien). Le film a eu beaucoup de succès à l’époque… mais rien à voir avec le Michael Curtiz d’Angels with Dirty Faces.

You Can’t Take It with You (Frank Capra, 1938) – 2/5: Alice (Jean Arthur), secrétaire, tombe amoureuse de son jeune patron, Tony (James Stewart). Son père (Edward Arnold) est un homme d’affaire un peu rapace, le total opposé du milieu bohème et excentrique dans lequel vit Alice, dont le grand-père (Lionel Barrymore) est un sacré personnage. Cette rencontre entre les deux familles ne peut que faire des étincelles. Cela n’a pas eu cet effet sur moi malheureusement, et je me suis bien ennuyée, d’autant plus que le film est long et ne varie pas trop les décors.

Alexander’s Ragtime Band (Henry King, 1938) – 2/5: Alexander (Tyrone Power) est violoniste classique et voit une carrière toute tracée devant lui. Sauf qu’il se lance dans un groupe de jazz, et rencontre la chanteuse Stella Kirby (Alice Faye), dont il tombe amoureux. Le film suit le groupe, ses premiers succès, la Première Guerre mondiale, et le retour sur scène, avec une succession de déceptions amoureuses qui malgré tout finissent bien (ce n’est pas un spoiler, tous les films de l’époque finissent bien). Par contre pour arriver à cette fin, ça met du temps et le scénario ne suit pas. C’est plus un film musical mettant en avant les compositions d’Irving Berlin, intéressantes, mais ça ne suffit pas. Beaucoup d’ennui donc.

Quai des brumes (Marcel Carné, France, 1938) – 4/5: Jean (Jean Gabin), un militaire des colonies qui a déserté, arrive au Havre. Il passe la soirée au Panama, un bar de bord de quai un peu isolé et y rencontre Nelly (Michèle Morgan). Il est attiré par elle, elle est terrorisée par son tuteur, Zabel (Michel Simon) qui a probablement tué son amant. Zabel est aussi poursuivi par les petits gangsters locaux. Un film sombre, tout en ambiances, triste et mélancolique, mais surtout très beau. A noter: le port, le chien, la foire et ses autos tamponneuses et toujours cette nécessité d’avoir des sous-titres pour une partie des dialogues.

The Citadel (King Vidor, Royaume-Uni, 1938) – 3/5: Andrew Manson (Robert Donat) est un jeune médecin idéaliste qui n’a pas peur d’exercer son métier dans des endroits compliqués: un village ouvrier atteint par des épidémies de typhus, une petite ville minière où les ouvriers sont malades, puis il part à Londres avec son épouse (Rosalind Russell) mais se laisse entraîner par la richesse et perd son objectif premier de vue. Ce n’est pas un mauvais film, ce n’est pas non plus un bon film, mais je ne me suis pas ennuyée, sauf un peu pendant la seconde partie. Les accents gallois sont intéressants, la haute société londonienne beaucoup moins.

At the movies – 44 (1930s)

Alexandre Nevski de Sergueï Eisenstein

Captain Courageous, Victor Fleming (1937) – 3/5: Harvey (Freddie Bartholomew), fils d’un des hommes d’affaires les plus riches des Etats-Unis est renvoyé de son école pour cause de tromperies et manigances. Son père qui ne s’est jamais occupé de lui décide de l’emmener en Europe. Harvey tombe du paquebot et est sauvé par des pêcheurs. Il passera plusieurs mois avec eux, partageant leurs activités et apprenant à vivre différemment. J’ai failli abandonner: la première demi-heure suit un ado gâté pourri et insupportable. C’est une fois sur le bateau de pêche que le film devient intéressant. Harvey reste tout aussi insupportable mais Victor Fleming devient documentariste, filmant la vie quotidienne des pêcheurs au cabillaud entre les bancs de sables du Newfoundland. C’est ce qui rend le film intéressant, le scénario étant plutôt bancal, et Spencer Tracy en marin portugais n’est pas très crédible. Avec aussi Lionel Barrymore en capitaine. A noter aussi la superbe course entres voiliers dans une mer assez démontée.

The Prisoner of Zenda, John Cromwell (1937) – 3/5: je me suis dit en commençant ce film: encore un machin historique un peu chiant quelque part dans le passé récent de la Mittel Europa de l’époque. Le prince héritier doit être couronné le lendemain, mais il est drogué par son frère jaloux (Raymond Massey, que je commence à apprécier de plus en plus) et incapable d’assister à la cérémonie. Heureusement se trouvait là Rudolf Rassendyll (Ronald Colman), Anglais et cousin éloigné du prince, mais surtout son sosie parfait. Il prendra donc sa place et se retrouvera mêlé contre son gré à cette aventure. Il y a de belles scènes de combats d’épée dans un château aux ombres et lumières très étudiées, il y a du romantisme dégoulinant (avec Madeleine Carroll en princesse) et surtout un méchant très méchant, l’acolyte du prince joué par Douglas Fairbanks Jr. A noter: la musique d’Alfred Newman, il n’y a pas de chat mais bien une référence à un chat qui serait la cause d’un bruit inopiné.

Pépé le Moko, Julien Duvivier (France, 1937) – 3/5: Pépé le Moko (Jean Gabin), criminel aguerri et recherché par la police, se cache dans la casbah d’Alger, soutenu par divers amis. Il a une compagne, Inès (Line Noro) mais tombe amoureux de la belle touriste française Gaby (Mireille Balin). On y retrouve des éléments du film noir (avant que le style n’explose vraiment) mais aussi de Morocco avec Marlene Dietrich dans les ombres et lumières. Le film est superbe mais je ne peux pas lui donner une cote plus élevée: il y a une dose de whitewashing avec des acteurs français jouant des Algériens et des commentaires sérieusement racistes par moments (notamment à propos de la musique « indigène » qui n’est pas très agréable à écouter). D’un autre côté, il y a deux compositeurs pour la musique, un Français, Vincent Scotto, et un Kabyle, Mohammed Iguerbouchène qui a écrit une musique très locale et très marquée par les traditions du music-hall algérien de l’époque. A noter: un second rôle pour la chanteuse française Fréhel. Et je comprends mieux l’aura de Jean Gabin après ce film, son rôle reste dans les esprits.

Stella Dallas, King Vidor (1937) – 4/5: Stella (Barbara Stanwyck) est une jeune femme issue de la classe ouvrière; elle épouse Stephen Dallas qui est d’une classe bien plus aisée, mais très vite, après la naissance de leur fille Laurel, le couple s’éloigne. Stella n’arrive pas à s’adapter à son rang et reste très vulgaire. Elle fait tout pour sa ville qu’on voit grandir, mais sa vulgarité met des bâtons dans les roues de vie de l’adolescente. J’ai été touchée par cette histoire d’une mère qui se sacrifie par amour pour sa fille, sans doute un peu plus que je n’aurais dû. Il y a en effet des passages pas du tout crédibles dans le film, comme les tenues et surtout les coiffures de Dallas qui deviennent de plus en plus extravagantes et laides, mais peu importe.

Ceci termine les films de 1937 et cela ne m’a pas semblé aussi interminable que 1936, même si j’ai eu l’impression de traîner vers la fin. Mes films préférés sont les screwball comedies, et Un carnet de bal. C’est aussi l’année où j’ai introduit le terme de white washing mais j’aurais déjà pu le faire auparavant; disons que ça m’a tout particulièrement marquée ici. 1938 est une des années où ma liste est assez courte, moins de vingt films.

The Adventures of Robin Hood, Michael Curtiz (1938) – 3/5: tout le monde connaît les aventures de Robin des Bois, popularisées par ce film mené par Errol Flynn (et avec Olivia de Havilland). Il y a de l’action, des combats, des poursuites, le tout dans les couleurs hyper saturées du Technicolor de l’époque. Mon regard a surtout été attiré par les collants verts de Robin et sa troupe, par les paillettes sur le premier costume de Robin, par la perruque trop stylée du roi Jean, et par les costumes en lamé de Lady Marian. Je n’ai sans doute pas apprécié ce film autant que je l’aurais dû vu son succès au fil des ans et Errol Flynn me laisse de marbre. A noter: la musique d’Erich Wolfgang Korngold.

Pygmalion, Leslie Howard & Anthony Asquith (Royaume-Uni, 1938) – 3/5: le professeur Higgins (Leslie Howard) est linguiste et spécialiste des accents britanniques qu’il reconnaît à quelques rues près. Un soir, en rue, il rencontre Eliza Doolittle (Wendy Hiller), vendeuse de violettes qui parle le plus pur cockney de Covent Garden. Il décide d’en faire une dame de la société, lui apprenant l’étiquette, les bonnes manières et l’accent british. Il est assisté par son ami, le Colonel Pickering (Scott Sunderland). C’est l’adaptation d’une pièce de théâtre et ça se sent, mais il est intéressant de voir comment le personnage d’Higgins est centré sur lui-même et rudoie la pauvre Eliza pour obtenir de meilleurs résultats. [spoiler] Mais il est aussi très jouissif de voir comment celle-ci se défend (même si c’est uniquement dans les dernières scènes). Avec une musique d’Arthur Honegger, les costumes avec cardigan en laine sous la veste de Leslie Howard et des robes de Schiaparelli et Worth.

Alexandre Nevski (Sergueï Eisenstein, URSS, 1938) – 4/5: Alexandre Nevski, valeureux guerrier, doit se battre contre les chevaliers teutons (aux superbes casques) qui ont envahi la Russie, le tout au coeur de l’hiver (alors que le film a été tourné en été). Noter ce film a été un peu compliqué: d’un côté, il y a la propagande anti-allemande et le patriotisme non voilé, ainsi que des scènes un peu trop longues et une narration trop linéaire, d’un autre, il y a la beauté fulgurante de certaines des images – et au final, c’est ce qui l’emporte pour moi. A noter aussi, la composition de Sergueï Prokofiev.

At the movies – 15 (1930s)

Jeanette MacDonald et Maurice Chevalier dans Love Me Tonight (domaine public)

Red Dust, Victor Fleming (1932) – 3/5: je ne crois pas que ce film était sur les listes des meilleurs films mais j’ai été intriguée par les livres de Mick LaSalle, à cause des acteurs et du lieu. L’histoire se passe donc dans une plantation tenue par Dennis Carson (Clark Gable) quelque part dans la jungle en Indochine. Son nouvel assistant arrive avec son épouse, Gary et Barbara Willis, ainsi qu’une prostituée fuyant Saïgon, Vantine (Jean Harlow). Dennis tombe amoureux de Barbara, mais au fil de l’histoire il se rend compte que la prostituée au bon coeur lui convient bien mieux. Gable est montré dans son rôle le plus macho, voire même sexiste, Harlow est superbe en femme de petite vertu mais capable de loyauté. Un film qui va droit au but. S’il n’y avait pas les passages racistes envers les « chinamen », qui accumulent cliché sur cliché, j’aurais donné une note supérieure. A noter: un perroquet, les plantations de caoutchouc, un tigre (« a big alleycat who is yodelling »). Mogambo (John Ford, 1953) est un remake mais situé en Afrique.

A Bill of Divorcement, George Cukor (1932) – 3/5: le mari de Meg (Billie Burke), Hillary (John Barrymore), est interné dans un asile depuis 15 ans et son divorce a été prononcé. Elle est prête à se remarier, et sa fille Sidney (Katharine Hepburn dans son premier rôle) aussi. Mais voilà que réapparaît Hillary, qui va mieux. Pour une fois, les âges des divers protagonistes sont plus ou moins réalistes, mais j’ai quand même été marquée par la minceur des actrices, y compris Meg. Un film pas mal, qui pose la question du divorce et de la folie.

Night after Night, Archie Mayo (1932) – 3/5: un film assez plaisant au final, racontant quelques jours de la vie de Joe Anton (George Raft), propriétaire de speakeasy et poursuivi par les gangs, et de ses relations avec des femmes: celle qu’il ne veut plus mais qui s’incruste (Wynne Gibson), celle plus âgée qui lui apprend les bonnes manières (Alison Skipworth), son amie propriétaire d’un salon de beauté (Mae West dans son premier grand rôle) et celle qui lui plaît (Constance Cummings). Mae West n’a pas sans langue dans sa poche et est très comique; elle porte aussi la plus belle robe cousue de paillettes (formant des lignes, très art déco). Pas un grand film mais tout à fait regardable ! A noter: à un moment, on voit un groupe hawaïen, avec un des musiciens qui joue une lap steel guitar; je n’ai pas trouvé qui ça pourrait être.

Love me tonight, Rouben Mamoulian (1932) – 1/5: j’ai eu du mal à regarder jusqu’au bout ce film musical avec Maurice Chevalier en tailleur de vêtements qui tombe amoureux de la jeune comtesse (Jeanette MacDonald), ce qui a priori est un amour impossible. L’histoire est confuse mais il y a quelques scènes filmiquement intéressantes: le début avec Paris qui s’éveille sur un rythme assez précis, puis la chanson qui est continuée par un autre personnage, et une scène de train très western. La version non-censurée par le code Hays n’existe malheureusement plus, on y voyait Myrna Loy dans un négligé qui montrait un peu trop son corps.

The Cabin in the Cotton, Michael Curtiz (1932) – 2/5: une histoire sociale avec un propriétaire terrain du sud qui exploite ses ouvriers travaillant dans les champs de coton. Avec Betty Davis dans un de ses premiers rôles et Richard Barthelmess qui est vraiment mauvais: pas d’expression (sauf celle – constante – d’un chien battu) et aucun jeu d’acteur. Ma note est liée à sa mauvaise performance.

Me and My Gal, Raoul Walsh (1932) – 3/5: comédie romantique avec une touche de film policier, avec Spencer Tracy et Joan Bennett. Un mélange d’histoire d’amour, de slapstick et de film de gangster pas vraiment réussi mais au final j’ai quand même aimé.

Ce film était le dernier dans ma liste de 1932. Dans les tentatives ratées, il y a The Music Box de James Parrott, un court film de 30 minutes avec Laurel et Hardy qui tentent de monter un piano le long d’une volée d’escaliers. Je n’ai pas la patience pour voir toutes leurs déconvenues. Je n’ai pas réussi à obtenir Chotard et cie de Jean Renoir mais je ne pense pas que ce soit très grave et je me suis rendue compte que les films de Yasujiro Ozu de l’époque sont encore muets (le parlant reste une condition pour moi).

Passage à 1933:

Terre sans pain (Las Hurdes, tierra sin pan), Luis Buñuel (Espagne, 1933) – 3/5: 27 minutes seulement pour ce court documentaire muet à la base mais auquel un commentaire en français a été rajouté à l’époque. Les images montrent la vie primitive d’un village extrêmement pauvre de l’Estrémadure en Espagne. Les images sont choquantes, encore aujourd’hui, mais certaines ont été mises en scènes (comme la chèvre qui tombe de l’escarpement rocheux ou l’âne couvert d’abeilles). Il existe plusieurs versions du film, l’une censurée de 1936 et l’autre restaurée de 1965 et je ne sais pas trop laquelle j’ai vue (elle était en complément sur le dvd de Los Olvidados – je n’ai vu que plus tard qu’il existait un autre dvd consacré uniquement à toutes les versions de ce documentaire).

At the movies – X (1930s)

Gloria Stuart et Boris Karloff dans The Old Dark House 

I Am a Fugitive from a Chain Gang, Mervyn LeRoy (1932) – 3/5: quelle histoire sombre ! Quand James Allen (Paul Muni) revient de la Première Guerre mondiale, il souhaite devenir ingénieur, mais sa famille s’y oppose et préfère qu’il prenne un job répétitif à l’usine. Il part sur les routes mais se retrouve mêlé à un hold-up. Il est alors envoyé en colonie pénitentiaire, dans un « chain gang ». Il réussit à s’enfuir et mène enfin une vie respectable sauf que le passé le rattrape. En 1932, la Grande Dépression commence clairement à laisser des traces aux Etats-Unis et ça se ressent dans ce film (même s’il se passe avant). A priori, l’histoire ne me tentait pas mais j’ai voulu connaître la suite et il y a un certain rythme dans le film. Avec Paul Muni, donc, qui surjoue pas mal, de belles scènes de train (et de hobo marchant sur les rails), des prisonniers en uniformes rayés qui chantent des gospels et beaucoup de scènes d’extérieur.

The Old Dark House, James Whale (1932) – 3/5: le classique film d’horreur avec la maison mystérieuse qui recèle des secrets. James Whale continue son travail inspiré de l’expressionnisme allemand mais à sa sauce: au jeu des ombres, il ajoute éclairs et jeux de lumière (comme ce couloir sombre où la lumière éclaire le rideau blanc). Avec Boris Karloff, mais aussi Gloria Stuart qu’on retrouvera en 1997 comme Rose dans Titanic, un de ses derniers rôles. Ici, elle est superbe dans sa robe de satin blanc moulante (le prétexte pour la mettre est un peu léger: son autre robe est trempée). Et une première version chantée de « Singin’ in the rain », par Melvyn Douglas (le morceau a été écrit à la fin des années 1920).

The Sign of the Cross, Cecil B. DeMille (1932) – 3/5: une superproduction complètement over-the-top. Dans la Rome antique, sous le règne de Néron (Charles Laughton), le préfet Marcus (Fredric March avec trop d’eyeliner) tombe amoureux d’une belle chrétienne alors qu’il est censé poursuivre et tuer les adeptes de la nouvelle religion. Orgies et décadence – Poppée (Claudette Colbert), l’épouse de Néron, prend un bain, nue, dans du lait d’ânesse (le tournage a mis plusieurs jours et ça sentait le rance à la fin), et le tout se termine dans l’arène avec des femmes quasi nues laissées en pâture aux crocodiles ou aux lions, une armée de pygmées (ou tous les acteurs nains d’Hollywood recouverts de teinture brune) combattant des femmes et puis les Chrétiens envoyés vers une mort certaine. Quant aux costumes, du moment qu’ils pouvaient montrer de grands bouts de peau nue… sauf pour la belle chrétienne évidemment. Du grand n’importe quoi qui a dû bien énerver les garants de la morale de l’époque. En tous cas, je me suis bien amusée !

One Hour With You, George Cukor, Ernst Lubitsch (1932) – 2/5: un film musical très dispensable, avec Maurice Chevalier, Jeannette MacDonald et Geneviève Tobin en triangle amoureux. A voir pour les superbes décors de maisons art deco, les voitures de l’époque et les magnifiques robes – c’est intéressant de noter d’ailleurs que les génériques d’époque sont minimalistes (une dizaine de noms) mais que le créateur des robes est mis en avant: Travis Banton.

A Farewell to Arms, Frank Borzage (1932) – 3/5: une adaptation du roman d’Ernest Hemingway avec Gary Cooper et Helen Hayes. Une histoire d’amour entre un militaire et une infirmière lors de la Première Guerre mondiale, en Italie. Un mélodrame très bien filmé, avec de beaux jeux de lumière, et une certaine tension sexuelle (et donc même du sexe avant mariage, filmé hors champ), mais je n’ai pas accroché.

Grand Hotel, Edmund Goulding (1932) – 2/5: encore un film entièrement tourné à l’intérieur, basé sur une pièce de théâtre, elle-même basée sur un roman de Vicky Baum. L’histoire mêle séduction, amour, rivalité et ambition. Greta Garbo et Joan Crawford, toutes deux dans la vingtaine (et ne partageant aucune scène), jouent face à des hommes dans la cinquantaine (John et Lionel Barrymore, et Wallace Beery – il n’a que 47 ans mais il n’est pas très attirant) – on dirait qu’à l’époque, seuls le public masculin pouvait baver sur les actrices, et non les femmes sur de beaux et jeunes mâles. A noter: les décors art déco, les robes d’Adrian (cité au générique), le central téléphonique qui rythme le film.

Scarface, Howard Hawks (1932) – 2/5: un film de gangsters inspiré par la vie d’Al Capone. Il y a beaucoup à dire sur ce film (il suffit d’aller voir la page en anglais sur wikipedia) mais je n’ai pas trop accroché. Les scènes de fusillades sont pas mal, très réalistes, mais je me rends compte que je n’aime pas l’acteur principal, Paul Muni. A noter: un perroquet en cage (et Boris Karloff qui ne joue pas de rôle de monstre ici).

At the movies – IV (1930s)

Shanghai Express (Paramount Pictures, domaine public)

Sous les toits de Paris, René Clair (FR, 1930) – 2/5: à mi-chemin entre un film muet et un film parlant, vu que René Clair n’était pas trop tenté par le son. L’histoire met beaucoup de temps à se dérouler, certaines scènes sont très longues, et l’ennui pointe très vite (j’ai failli abandonner). On voit que c’est tourné en studio, mais les plans en travelling du début et de la fin sont impressionnants. Une histoire de femme libre (la très belle Pola Illéry) qui passe d’un homme à l’autre, et les jalousies entre ces hommes (dont l’un est un gangster).

Der blaue Engel, Josef von Sternberg (DE, 1930) – 3/5: ce film est donc considéré comme un chef d’oeuvre. Sauf que je me demande parfois s’il ne faudrait pas changer de critères. Alors, oui, Marlene Dietrich est pas mal dans son rôle de chanteuse de cabaret, mais sans être exceptionnelle. Par contre, Emil Jannings, apparemment la superstar allemande du moment, en fait bien trop. Et puis, il y a cette histoire qui met beaucoup trop de temps démarrer et qui n’est pas très crédible. Mais il est clair que Josef von Sternberg a du talent; j’ai cependant bien plus apprécié son film suivant, Morocco, moins brouillon, plus clair et défini dans l’image.

L’âge d’or, Luis Buñuel (FR, 1930): difficile de mettre une cote à ce film surréaliste. Je ne peux pas dire que j’ai accroché (surtout avec les scènes du début montrant des scorpions), même si je comprends l’importance de ce film pour l’histoire du cinéma. Je pense que ce sera un problème récurrent: j’ai beaucoup de mal avec le surréalisme et le grotesque.

The Dawn Patrol, Howard Hawks (1930) – 3/5: un autre film sur les aviateurs pendant la Première Guerre mondiale, dont la post-production a été accélérée pour qu’il sorte avant Hell’s Angels produit par Howard Hugues. Ce dernier avait poursuivi le studio pour plagiat mais perdra le procès. L’histoire est bien plus centrée sur les aviateurs, tout particulièrement Courtney joué par Richard Barthelmess et Scott jouée par Douglas Fairbanks Jr., et montre le côté sombre de la guerre. En effet, jour après jour, de jeunes pilotes non expérimentés sont envoyés vers leur mort. Howard Hawks avait lui-même été instructeur pendant la guerre et joue dans le film un pilote allemand (non crédité).

Shanghai Express, Josef von Sternberg (1932) – 5/5: mais pourquoi est-ce que j’ai attendu si longtemps pour voir ce film ? J’avais pourtant déjà lu un roman et un récit du scénariste, Harry Hervey et les ambiances « exotiques » ont tout pour me plaire. Mais en plus, la lumière et la photographie sont superbes et c’est un film très féministe: ce sont les deux femmes qui font avancer l’histoire dans le bon sens, alors que tout le monde les méprise à cause de leur statut de courtisane. Marlene Dietrich et Anna May Wong sont juste magnifiques.

Little Caesar, Mervyn LeRoy (1931) – 3/5: avec ce film, je passe à 1931 (Shanghai Express était un détour lié à une playlist pour le boulot). C’est un des premiers films de gangsters et il a contribué à la création des codes de ce genre (apparemment, j’aurais aussi dû regarder The Doorway to Hell d’Archie Mayo, datant de 1930, avec James Cagney). C’est donc un film très masculin, avec fusillades et poursuites en voiture. Mais il y a autre chose: Rico, joué par Edward G. Robinson (qui n’est pas le plus beau des acteurs et qui a une voix qui irrite un peu), est mené par l’amitié qu’il a pour son ancien acolyte, Joe (Douglas Fairbanks, Jr) qui a quitté le gang pour devenir danseur. Mick LaSalle (dans Dangerous men. Pre-Code Hollywood and the birth of the modern man) y voit une des premières relations homosexuelles montrées à l’écran. Si c’est le cas, c’est extrêmement subtil, mais sans doute que c’était nécessaire à l’époque.

The Public Enemy, William A. Wellman (1931) – 3/5: second film de gangsters de 1931, qui a été en compétition avec Little Caesar à l’époque pour attirer le public. Premier grand rôle de James Cagney, et très mauvais rôle de Jean Harlow. Le film est connu pour sa célèbre scène du pamplemousse (Cagney, excédé, écrase un demi-pamplemousse sur le visage de Mae Clarke au petit-déjeuner). J’ai aussi noté ce tailleur ouvertement homosexuel et un chat noir qui traverse la rue. Réalisation dynamique qui fait qu’on ne s’ennuie pas un moment.

(J’ai quelque part décidé que ces articles seraient composés de sept notices, on verra si je continue à ce rythme-là. Je me suis aussi demandée si je ne devrais pas plutôt mélanger les décennies, ce qui permettrait de publier certaines notices plus vite).