This was 2018

A vrai dire, je me rends compte que je n’ai pas trop envie d’écrire ce billet, je n’ai pas trop envie de revenir sur cette année éprouvante. Et pourtant, ce n’est pas plus mal de faire le bilan. Une fois de plus, j’ai réalisé que les années telles que je les vis ne correspondent pas vraiment au calendrier, il s’agit plus de cycles commençant en novembre ou décembre et se terminant en octobre ou novembre.

Décembre 2017 avait été secoué par les problèmes de mon papa et son déménagement en maison de repos. Je savais donc très bien ce qui m’attendait pour 2018 – vider sa maison et la vendre. Je me suis fixée comme but le mois de juin – un délai qui a été respecté pour la partie vidage. J’ai passé presque tous mes weekends de l’hiver à trier et à faire des caisses, me mettant en mode pilote automatique. Je souhaitais que ce soit terminé rapidement, ne voulant pas que cela me pèse trop longtemps. Cela a été difficile, mais j’ai suivi mon programme, et j’ai eu de l’aide d’amis, d’abord pour vider le grenier sous le toit, puis plus tard pour ranger la maison et déplacer des meubles pour faire joli sur les photos de l’agent immobilier. Et puis aussi un grand soutien moral de ma cousine qui faisait exactement la même chose quelques maisons plus loin.

J’ai ramené une quinzaine de grandes caisses chez moi et je les ai entreposées à la cave (pour la vaisselle) et au grenier – qui est aussi ma pièce de couture. Quand je les ai vues amassées là, j’ai eu un sentiment de découragement: j’ai eu l’impression d’être envahie, d’avoir perdu la légèreté qu’émanait cette pièce assez vide. Mais je n’avais plus l’envie ni l’énergie de trier; il me fallait du temps (je commence à m’en occuper neuf mois plus tard).

Février m’a heureusement apporté une distraction: j’ai été un weekend à Metz où j’ai été accueillie chaleureusement par Laurie. J’ai vu une belle expo d’art contemporain japonais et j’ai flâné dans les rues de la jolie ville. Ces deux jours ont été marqués par la lumière du ciel d’hiver. J’en ai profité pour faire un arrêt au Luxembourg pour acheter du rhum et du bourbon. Et j’ai dépassé une de mes angoisses: j’ai fait le trajet en voiture ! C’était la première fois que je roulais aussi loin (et que je sortais la voiture de Belgique).

J’ai dû prendre beaucoup d’initiatives, être présente pour de nombreux rendez-vous, d’abord pour des voisins intéressés par l’achat de la maison – aucun ne se décidera – puis pour l’agent immobilier. J’ai voulu aller vite, je n’en ai rencontré qu’un seul et c’était sans doute une erreur. Mais il a trouvé un candidat acheteur dès les premiers jours de visite. Et c’est là que tout a dégénéré: après avoir signé le compromis d’achat, cette personne est devenue très agressive suite à un problème d’infraction à l’urbanisme datant de 1980, que j’ai réglé très vite (j’aurais dû m’en occuper plus tôt, j’en conviens). Son agressivité s’est traduite en lettres d’avocats, un second se succédant à un premier qui avait très vite lâché l’affaire. Et cela a évidemment provoqué des grandes angoisses. J’ai passé un très mauvais été, ne profitant que peu du beau temps. Mais j’ai tenu bon et défendu les intérêts de mon père.

Pendant ce temps, j’avais organisé la vente de livres et de certaines oeuvres d’art de mon papa, grâce à un ami qui m’a donné beaucoup d’adresses. Début juillet, un vide-maison a fait table rase, emmenant tout ce qui restait. Je n’ai presque pas visité la maison vide et je me sens toujours un peu triste. J’ai souvent des pensées qui me traversent l’esprit, me rappelant tel ou tel objet, me demandant si je n’ai pas laissé de chose importante.

J’aurais aimé faire un citytrip en été mais j’avais chaque fois des choses à régler, ou peur de ne pas être là pour la prochaine lettre d’avocat. Par contre, dès la mi-mai, j’ai organisé mon voyage au Japon à l’automne. Cette perspective m’a beaucoup soutenue.

Mi-septembre, l’acte a enfin été signé, un mois après la date prévue à l’origine. J’en suis ressortie blessée et épuisée, l’acheteur ayant encore proféré de nombreuses menaces et m’ayant traité de personne fausse et mauvaise. Ce qui fait mal, parce qu’il ne m’a jamais laissé de moment pour lui prouver le contraire. Et je n’ai pas vraiment eu de conclusion de ce dossier à cause de ses menaces de poursuites dans le futur.

Pendant ce temps là, la santé de mon père a décliné. Il se déplace de plus en plus difficilement, il se répète constamment et a des moments où il devient difficile et exigeant. J’ai eu du mal à accepter qu’il me délègue tout le travail avec autant de légèreté et il m’a quelquefois vexée. Je crois qu’il ne s’est jamais rendu compte de l’ampleur de la tâche et de la quantité de choses inutiles qu’il avait gardées (je n’oublierai jamais ces cinq percolateurs cassés). Notre relation est toujours aussi compliquée et je n’ai eu que peu de moments de complicité – ceux-ci impliquent en général des conversations sur les voyages (ce qui me pousserait presque à voyager plus souvent !).

Au travail, heureusement les choses se sont bien passées. J’ai été responsable d’un projet de janvier à juillet. Cela a pris beaucoup de temps mais j’ai beaucoup aimé m’en occuper. D’une certaine manière, cela a sans doute augmenté un peu ma crédibilité auprès de mon supérieur. Ce qui n’est pas plus mal.

Fin octobre, je suis partie pour trois semaines au Japon. Ce voyage a permis de clôturer mon année difficile. J’ai pu oublier mes soucis et ne penser qu’à moi. J’ai eu une chance incroyable, tout particulièrement avec la météo. Et puis il y a eu ce moment précis où j’ai fondu en larmes au milieu de la randonnée à Yakushima. J’ai senti un poids s’envoler, entourée par les arbres millénaires et les esprits de la forêt. Quand je suis rentrée, j’étais sur mon nuage. Les plaintes de mon papa suite à une nouvelle chute m’ont malheureusement fait retomber sur terre mais cela s’est estompé depuis. Les kodama (esprits) de Yakushima sont toujours près de moi.

Ce billet est déjà tout un roman mais je voudrais encore dire quelques mots à propos de mon état d’esprit. Cette année a été très éprouvante, j’ai verrouillé beaucoup de mes sentiments, je ne leur ai pas ou peu laissé de place pour s’exprimer. C’est sans doute pour cela qu’écrire ce bilan est compliqué parce que je souhaite oublier et passer à des choses plus positives. On pourra me dire que ce n’est pas une bonne idée et que tout cela reviendra me hanter. Peut-être.

Je me rends compte que face à l’agressivité primaire, je perds mes moyens; je suis quelqu’un qui préfère discuter en utilisant tous mes talents de diplomatie et si cela ne fonctionne pas, je préfère me taire (et fuir). J’aimerais trouver des outils pour mieux faire face à ce genre de situations (en espérant évidemment qu’elles ne se reproduisent pas).

Mais ce que je voulais surtout exprimer, c’est que malgré tous ces soucis, ces angoisses qui ont provoqué de nombreuses nuits sans sommeil, qui m’ont rendues malade par deux fois, je me sens heureuse. J’ai été bien entourée et soutenue, par ma cousine et mes amis. Pour la première fois depuis un moment, j’ai passé mon anniversaire et le 24 décembre en bonne compagnie. Mon sommeil est à nouveau normal et je suis beaucoup moins fatiguée, ce qui me rend plus ouverte au monde extérieur. Je sais où sont mes limites et quand je dois dire non. J’ai trouvé un équilibre dans ma vie et même les difficultés n’ont pas réussi à l’ébranler. Je suis prête pour une nouvelle année !