La bête

Zidrou & Frank Pé, La bête: pendant mon enfance et adolescence, je lisais pas mal de bandes-dessinées belgo-françaises, puis je me suis tournée vers la bd américaine indépendante et quelques mangas. Puis plus rien. Pendant une vingtaine d’années. Je recommence tout doucement depuis un an (et je n’en parle pas systématiquement ici)… Et un ami m’a gentiment prêté La bête. J’ai toujours aimé les marsupilamis, et ici encore, le charme a opéré, bien plus que prévu même. C’est une histoire sombre: capturé en Palombie et vendu à des trafiquants d’animaux, la bête arrive en bateau au port d’Anvers, au début des années 1950. Il réussit à s’échapper, non sans avoir massacré les trafiquants, et se retrouve à Bruxelles. C’est là que vit le petit François, gamin raillé par ses camarades d’école parce que père était un soldat allemand. Sa mère tente tant bien que mal de nouer les deux bouts mais aime de tout son coeur son fils. Celui-ci a l’habitude de ramener tous les animaux abandonnés et blessés à la maison qui est devenue une vraie ménagerie. Un jour, il trouve la bête et prend soin d’elle.

Comme je le disais plus haut, c’est sombre, noir, triste. Il pleut tout le temps. Mais c’est superbe en même temps. Les personnages traînent leurs casseroles, et le marsupilami a été arraché de sa jungle, se retrouvant dans un milieu urbain où il devient un spécimen à analyser. Le dessin utilise des perspectives insolites (ce bateau immense vu depuis le ras du sol). C’est très belge aussi, ça se passe à Bruxelles et de nombreux mots sont en dialecte (avec traduction en français pour ceux qui ne comprendraient pas). J’attends le second volume avec impatience.

Tant pis pour l’amour

Quand la lecture d’une bd me renvoie à mon passé. Une critique qui n’est pas vraiment une critique.

Sophie Lambda, Tant pis pour l’amour. Ou comment j’ai survécu à un manipulateur: j’ai d’abord vu cette bd chez Une Comète, mais je ne me sentais pas prête, puis sur l’instagram d’une amie qui a vécu ce genre de relation et qui le conseillait vivement. Je me suis décidée, et ce n’a pas été une lecture facile pour moi. Mais dès les premières pages, je me suis sentie accompagnée par les commentaires de la peluche de Sophie. C’est elle qui m’a permis de continuer ma lecture (j’ai aussi une collection de peluches qui me tiennent compagnie).

Il y a plus d’une quinzaine d’années, j’ai rencontré un homme, le déclic s’est fait immédiatement, l’attirance était mutuelle. Nous avons très vite commencé une relation, nous étions sur la même longueur d’ondes. Le blog n’était pas encore né à cette époque mais il apparaîtra un peu plus tard. Je n’y parlais que de choses et autres, quelques livres, quelques musiques, divers objets. Ce n’est que plus tard qu’il est devenu plus personnel, et j’ai commencé à raconter ma vie. Si je le relisais aujourd’hui, j’y verrais une longue chute jusqu’à notre séparation neuf ans plus tard, mais je sais aussi que j’ai caché beaucoup de choses. J’ai longtemps été aveuglée.

Si Sophie Lambda se rend compte assez vite qu’elle est en proie à un manipulateurs – quelques mois si j’ai bien compris – il m’aura fallu des années pour comprendre que quelque chose ne tournait pas rond. Et ce n’est vraiment qu’en lisant la liste des 30 critères cités dans bd que je me suis rendue compte que c’était le cas. J’ai cherché des excuses, la longue durée de notre relation et les premières années très heureuses ne rendaient pas cette perception facile. Mais voilà, sur les 30 critères, entre 17 et 20 correspondent à la réalité. C’est dur quand on s’en rend compte (mon coeur bat la chamade une seconde fois en écrivant ce billet). LE critère qui me saute le plus aux yeux, c’est « Il ment ». J’ai mis un moment à le réaliser et pourtant c’était constant, j’avais déjà eu beaucoup de doutes mais c’est finalement une bosse dans voiture provoquée par lui m’a ouvert les yeux. Il n’a pas parlé de cette bosse, du côté avant droit; il a juste garé la voiture devant la maison. Quand je l’ai confronté, il m’a dit que c’était sans doute le camion poubelle qui avait embouti la voiture et n’avait pas prévenu. Or, matériellement, c’était impossible, le côté droit étant le long du trottoir. Là son discours s’est embrouillé, mais je n’ai jamais eu l’explication. (L’explication probable est qu’il avait embouti un poteau sous l’effet de l’alcool).

Et ce n’est qu’un exemple. Je pourrais écrire un roman entier mais ce serait trop douloureux. Encore un quand même, que je n’ai jamais raconté sur ce blog – les shorts diaries n’existaient pas encore et je ne racontais pas ma vie au quotidien: il venait d’avoir son permis de conduire (ou était encore en apprentissage ?) et demande donc de prendre le volant pour les courses au supermarché. J’accepte mais je me rends compte très vite qu’il n’est pas en état (un mélange d’alcool et de médicaments sans doute). Pour le retour, je lui demande les clés. Il refuse. Et il me plante là sur le parking. J’ai pleuré les 45 minutes du trajet de retour à pied, j’ai pensé au suicide ce jour-là en passant sur le pont de l’autoroute. Et pourtant, nous sommes encore restés ensemble, j’étais trop aveuglée par mon amour.

J’étais un poids pour mes amis, beaucoup ont décidé de ne plus me voir. Ceux qui sont restés ont tenté de m’ouvrir les yeux mais ont baissé les bras et ont observé de loin. Ma maman était déjà décédée, mon père, je ne sais pas trop s’il a compris l’ampleur de la situation. Je n’allais plus voir ma psy (qui elle, avait compris, mais n’a pas réussi à avoir prise sur moi).

La dernière année a été la plus difficile. On s’est séparé en février mais il n’a quitté la maison qu’en octobre parce que je lui ai permis de rester le temps qu’il trouve un endroit où se reloger. Je n’avais jamais imaginé que ça prendrait autant de temps et de disputes.

Son mal-être était tellement immense qu’il déteignait sur tout son entourage et ça s’est traduit par une manipulation sournoise et progressive. Je n’ai jamais vu les signes: peu d’amis (il s’était disputé avec beaucoup de personnes), l’impossibilité de garder un boulot (trop de conflits), la relation conflictuelle avec ses parents (séparés), les addictions (qu’il cachait – alcool, médicaments, sexe…), l’impossibilité de gérer son argent (des dépenses inconsidérées malgré les dettes), l’agressivité qui pouvait sortir subitement (mais il ne m’a jamais frappée – il est possible que si ça avait été le cas, les signaux se seraient mis au rouge immédiatement)… Et pourtant quand j’énumère tout ça ici, ça saute aux yeux, non ?

J’ai pleuré en écrivant tout ça, évidemment, mais c’est nécessaire, je pense. C’est bien la preuve que je n’ai pas encore évacué toute cette tristesse. Et j’ai toujours un peu peur d’en parler, peur de certaines conséquences possibles.

J’ai très vite été mieux une fois seule, et je suis bien plus heureuse maintenant. Et c’est la seule conclusion qui compte au final.

Short diary of the week (318)

Lundi: la fatigue due au rhume (qui hésite toujours entre nez bouché ou toux), une panne d’internet au boulot, le retour de l’internet après deux heures, mettre des choses en ligne, cuisiner un plat pour les midis de la semaine, deux épisodes de Modern love, de la lecture mais le ratio nombre de pages qui restent à lire/fatigue est inégal

Mardi: ces transports qui n’avancent pas mais c’est l’occasion pour lire, terminer les trois dernières pages du roman au bureau, une réunion d’apprentissage, tenter d’avancer, mais avoir un gros coup de pompe, chercher des idées, des achats de bd et livres, une envie de pâtes lardons fromage et petits pois, le début de Midnight Diner – Tokyo Stories, Masterchef the Professionals – pas sûre que je vais regarder toute la série, le nez qui a décidé de se boucher juste avant d’aller dormir

Mercredi: toujours aussi enrhumée, revenir à ce texte mais il me manque des infos (qui sont à la maison), terminer des petits trucs, hésiter longtemps pour le repas du soir, terminer la série Modern love que j’ai beaucoup aimée (et pleurer à chaudes larmes)

Jeudi: ah mais voilà ce qu’il fallait pour débloquer l’écriture de ce texte, bien avancer dans d’autres choses également, planifier la fin de la semaine, le rhume a l’air de s’améliorer – enfin, deux épisodes de Midnight Diner – Tokyo Stories et un de Buffy

Vendredi: diverses choses, passer beaucoup de temps à fouiller le net pour des photos, en avoir marre et partir plus tôt, hésiter devant une veste d’hiver plutôt sportive et me dire que j’en ai déjà une qui me va encore, retrouver mes amis chez Edgar’s Flavors, un Colette & Toby très fruité puis une Foggy Margarita bien fumée, se régaler de petits plats vietnamiens chez Nénu – dire que j’allais avec mes parents au restaurant du père, rentrer pas trop tard

Samedi: même avec la bouillotte j’ai eu froid au lit, un moment de calme avant une journée bien remplie, aller chez mon papa qui est de nouveau tombé (heureusement il a juste un gros bleu mais pas mal), les courses, une après-midi à goûter des alcools et à discuter au Spirits in the Sky, me faire filmer en parlant finlandais pour les gins Kyrö, évidemment la soirée n’est plus très active après ça !

Dimanche: des lessives et du pliage de linge, rentrer toutes les plantes fragiles et aider ma voisine à emballer ses bananiers, lire deux BD, jouer le reste de l’après-midi, cuisiner un plat de gibier, L’amour de l’actrice Sumako (Kenji Mizoguchi, 1947) – une image toute tremblante mais une histoire mettant une femme au premier plan