Stefan Hertmans, De bekeerlinge (traduit en français sous le titre: Le coeur converti): Stefan Hertmans possède une résidence dans le petit village provençal de Monieux. Il y passe ses journées à écrire et s’intéresse à l’histoire locale, notamment au pogrom qui s’est déroulé là au Moyen Age et au trésor caché qui n’a jamais été retrouvé. Il découvre aussi des anciens documents retrouvés au Caire qui parlent d’une jeune fille chrétienne convertie au judaïsme. Le village et la femme sont liés et Hertmans raconte leur histoire. Vigdis Adelaïs est une jeune fille appartenant à l’aristocratie de Rouen, de père normand (Viking donc) et de mère flamande. Elle rencontre David, étudiant juif à la yeshiva locale. Les deux jeunes gens tombent amoureux mais leur amour est impossible à cause de leurs origines et de leurs religions. Ils décident de fuir, retrouvant la famille de David dans le sud, puis fuyant les chevaliers partis à sa recherche et se cachant à Monieux, le petit village isolé des montagnes. Ce n’est que le début de l’histoire: l’époque est troublée, la première croisade se met en route et passe par le village, tuant au passage tous les Juifs, ou presque. Vigdis, devenue Hamoutal depuis sa conversion, fuit et commence un long voyage qui la mènera en Egypte. Stefan Hertmans suit ses traces, interrompant le récit pour raconter son périple contemporain. Il parle des lieux traversés par le couple, puis par la jeune femme, s’attache aux sources historiques, mais invente aussi, crée des personnages de chair et d’os.
L’écriture est précise, descriptive et j’ai eu le sentiment que le choix des mots en néerlandais était réfléchi pour qu’ils soient percutants et sonores, qu’ils se fassent le miroir de la violence et des difficultés de l’époque et de l’âpreté des paysages. Parce que l’histoire est parfois difficile à lire, elle peut être très intense et brutale. J’aimerais lire un bout de la traduction pour voir si les mots sont aussi efficaces dans leurs sonorités.
C’est une lecture qui ne laisse pas de marbre et qui renvoie à des sujets d’actualités contemporains. Elle dévoile aussi des pages de l’histoire moins connues (je ne me suis par exemple jamais attardée sur les croisades et surtout leur violence) tout en contant une magnifique histoire d’amour. J’ai beaucoup aimé et j’ai déjà dans ma PAL du même auteur Oorlog en terpentijn (Guerre et térébenthine), le récit contant la Première Guerre mondiale qui risque certainement de toucher quelques cordes sensibles chez moi. Je conseille vivement même si la lecture peut parfois être difficile à supporter.
J’ai exactement le même ressenti. C’était un excellent roman, mais parfois dur, ce qui m’a poussée faire une pause d’une semaine dans ma lecture.
L’aspect « autofiction » m’a d’abord déroutée et j’ai failli lâcher l’affaire très tôt, avant de me laisser entraîner par le récit de l’auteur, à qui cette histoire tient clairement très à cœur. C’est une période que je connais sans doute mieux que toi et un détail m’a fait hausser les sourcils (je me demande s’il ne s’agit pas d’une erreur de traduction). Pour ce qui est du texte français, il est tout aussi ciselé, mais perd sans doute en sonorités (en revanche à aucun moment je n’ai eu l’impression de lire une traduction, ce qui est bon signe).
Au départ, le côté autofiction m’a déroutée aussi mais je l’ai très vite intégré à ma lecture.
De quel détail parles-tu ?
C’est vraiment un détail : à un moment, l’auteur parle d’alimentation et, dans la liste des légumes consommés à l’époque, mentionne les « petits pois »… qui seront importés en France via l’Italie au XVIème siècle.
ah je n’ai pas tiqué 😉
Quand je disais que c’était un détail… 😀
Votre discussion sur FB cette semaine et cette chronique me donnent envie de le lire !
Surtout que tu n’habites sans doute pas si loin que ça de Monieux !
Isa : tu devrais, même s’il y a des passages vraiment difficiles ! A ne pas lire quand on n’a pas le moral, je dirais… mais l’évocation du XIème siècle est vraiment convaincante, et on a l’impression de marcher dans les paysages que décrit l’auteur.
Kleo: peut-être qu’il s’agit d’une confusion entre le petit pois mangé frais, qui est donc assez récent, et le pois mangé sec qui est beaucoup plus ancien.
(ce genre de détail m’intéresse aussi 😉 )